Chico Aragão

Fado: Mísia est décédée ce samedi


La chanteuse de Fado Mísia, qui a vécu quatre ans à Paris, est décédée ce samedi, à Lisboa, à l’âge de 69 ans, suite à une longue séquence de trois cancers. L’annonce de son décès a été confirmé par l’écrivain Richard Zimmler, qui était son ami. Les cérémonies funèbres auront lieu la semaine prochaine.

La veillée funèbre de la chanteuse aura lieu le 6 août, de 18h00 à 23h00, à la Basílica da Estrela, à Lisboa et le lendemain, entre 9h00 et 13h00, «il y aura une cérémonie d’hommages», suivie du départ du corps vers le Cimetière Alto de São João, à 14h00.

«Il ne nous reste plus qu’à rendre hommage à l’artiste, comme un geste fondamental pour honorer sa mémoire et apaiser la douleur de ses proches», peut-on lire dans une note de presse de l’agence Uguru qui représentait Mísia.

Susana Maria Alfonso de Aguiar, de son vrai nom, est née à Porto et a eu une carrière d’environ 34 ans, au cours de laquelle elle s’est produite sur les scènes les plus diverses du monde et a reçu différents prix, dont le prix français de l’Académie Charles Cross pour album «Garra dos Sentidos», dans lequel elle a enregistré des poèmes de Natália Correia, Mário Cláudio, Lídia Jorge, José Saramago, Lobo Antunes, Fernando Pessoa, Mário de Sá Carneiro et António Botto. Mais le répertoire de Mísia va au-delà du fado, car elle n’a pas hésité à enregistrer des reprises d’Édith Piaf ou encore de Jacques Brel.

Resteront pour la mémoire ses concerts au Théâtre des Bouffes du Nord, à Paris, (en 2007), lors du Gala du centenaire de la Salle Gaveau à Paris (en 2008) ou encore en 2020, pour présenter “Pura Vida”, son quatorzième album, en y intégrant pour la première fois des guitares électriques.

La Fadiste assumait un “énorme lien” avec la France. “Artistiquement j’ai un énorme lien avec la France. J’ai eu un éditeur français, et c’est dans ce pays que j’ai lancé des disques três importants pour ma carrière. En France, et en particulier à Paris, j’ai fait pratiquement toutes les salles” disait l’artiste.

En 2004, le Ministre français de la Culture, Jean-Jacques Aillagon nomme Mísia Chevalier de l’ordre des Arts et des Lettres. Elle reçoit également la plus haute distinction de la ville de Paris, la Grande Médaille de Vermeil par le Maire de Paris Bertrand Delanoë. L’année suivante elle est distinguée de l’Ordre du Mérite de la République portugaise.

Dans une note de regret, le Gouvernement portugais a souligné qu’«elle a été une voix fondamentale dans le renouveau du fado».

«Avec une vaste carrière, Mísia a été une voix fondamentale dans le renouveau du Fado, sans crainte d’expérimenter de nouveaux sons et des approches moins conventionnelles», a déclaré la Ministre de la Culture, Dalila Rodrigues, soulignant qu’elle «a gagné la reconnaissance de ses pairs».

«Elle nous laisse avec une vaste liste de collaborations avec des musiciens du monde entier, ce qui démontre sa polyvalence et son talent», a souligné la Ministre portugaise.

Aussi, le Président de la République, Marcelo Rebelo de Sousa, a rappelé «avec nostalgie» la chanteuse de Fado, se souvenant de Mísia comme «une amie infatigable des poètes» et «une chanteuse intense, reconnue et aimée au-delà des frontières».

Dans une note publiée sur le site officiel de la Présidence de la République Portugaise, Marcelo Rebelo de Sousa affirme que la chanteuse est décédée «après un long combat contre la maladie».

«Depuis qu’elle est venue vivre au Portugal, depuis l’Espagne, et qu’elle a fait ses débuts sur un album, en 1991, Mísia était synonyme de ‘pura vida’, pour citer l’un de ses titres. Une interprète du fado à l’intersection d’autres musiques, une amie infatigable des poètes, une passionnée de collaboration, une chanteuse intense, reconnue et aimée au-delà des frontières», peut-on lire dans la note.

Le Chef de l’État portugais ajoute que «la passion, les lamentations et le désir pour ses disques, ses spectacles et sa vie» ne seront pas oubliés.

Mísia a sorti son premier album, du même nom, en 1991. L’album «Pura Vida – Banda Sonora» lui a valu, en 2019, le Phonographic Critics Award, une récompense décernée par la critique allemande du disque.

En 2022, dans le livre autobiographique édité à l’occasion de la sortie de l’album «Animal Sentimental», la chanteuse de fado raconte des épisodes inédits de sa carrière, remontant à ses souvenirs d’enfance et d’adolescence, ses jours au pensionnat tenu par des religieuses à Porto, sa grand-mère catalane et sa mère, danseuse de flamenco… Dans cette œuvre, la chanteuse raconte aussi son combat contre le cancer, qui lui a été diagnostiqué à trois reprises.

«Aujourd’hui, ‘les mots portent le deuil’. Mísia a disparu, mais nous laisse un héritage artistique immense et diversifié. De la disruption à l’innovation dans le Fado, de l’amour de l’art pour l’art, à la révolution du corps, au choix singulier d’un chemin fait de ressenti» dit l’agence Uguru et Marie Jo Lecerf, l’attachée de presse qui connaissait si bien Mísia. «Elle nous laisse une discographie qui révèle l’‘Animal sentimental’ qu’elle était».

LusoJornal