20 ans de LusoJornal : «Mário Soares reçut un Doctorat Honoris Causa» à Bordeaux


Message d’Yves Léonard

Historien, Sciences-Po

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À rebours de la célèbre formule de Paul Nizan ouvrant Aden Arabie, avoir vingt ans c’est probablement le plus bel âge de la vie. Celui où tous les possibles restent ouverts.

À parcourir les archives numérisées de LusoJornal des dix dernières années et à se remémorer articles et unes des premières années en version papier, nul doute que de solides fondations ont déjà été posées. Et que LusoJornal est d’utilité publique pour tout lusophile.

Raconter une anecdote ou un épisode marquant des vingt années d’existence de LusoJornal, c’est se souvenir en feuilletant une éphéméride dont on essaierait de détacher une page.

Parmi tant d’autres, je retiendrais l’évocation de cette belle journée de début décembre 2010 où Mário Soares reçut un Doctorat Honoris Causa – son troisième en France, après ceux de Rennes-2 et de la Sorbonne-Nouvelle – à l’Université Michel de Montaigne-Bordeaux. «Parce que c’était lui, parce que c’était moi» serait-on tenté de dire pour expliquer un tel choix.

Au soir de son existence, il avait conservé toute son acuité et son optimisme lucide, malgré bien des nuages sombres à l’horizon. À ses côtés à la tribune, devant un amphithéâtre comble, je disposais de quinze minutes, guère plus, pour «planter le décor» en présentant l’histoire du vingtième siècle portugais et de l’un de ses principaux acteurs. Rude mission facilitée par la prévenance et l’humour de cette figure de proue de la démocratie portugaise née de la Révolution des Œillets. Avec le plaisir manifeste qu’il éprouvait à témoigner une nouvelle fois ici, en France, pays d’un exil forcé au début des années soixante-dix. En nous redisant sa foi inlassable dans l’enseignement d’une histoire contemporaine à l’épreuve des faits. Fier aussi de cette Fondation qu’il avait créée à la fin de son mandat présidentiel en 1996. Avec le même enthousiasme, il nous avait présenté son riche fonds d’archives à Sciences Po en mars 1997 lors d’un colloque sur l’histoire de l’Estado Novo que nous avions organisé et qu’il avait accepté de présider. Avec le même souci de se rendre accessible et d’échanger «à hauteur d’hommes». Rien de plus normal en un sens sur les terres de Montaigne. Rien de plus inspirant, comme on dit, par temps d’incertitude, pour honorer la mémoire d’une grande figure européenne, l’année même du centenaire de sa naissance. Rien de plus engageant, somme toute, pour souhaiter vingt nouvelles belles années à LusoJornal.

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