Joana Pereira : Une étoile de plus dans le ciel du Fado parisien



L’épidémie de Covid venait de s’éloigner, et le fado, comme toutes les activités culturelles, revenait sur les quelques scènes où il se donne plus ou moins régulièrement. Le Portologia, comme les soirées du Coin du Fado ou les rencontres mensuelles de Gaivota, consacrait un moment de ses soirées à ce qu’on appelle «Fado vadio», au cours duquel les spectateurs, amateurs ou professionnels de passage, sont conviés à chanter un ou deux fados.

Que ce soit à Lisboa, à Paris ou ailleurs, passer par le Fado vadio est souvent la première étape pour entrer dans le milieu, restreint, du fado. A Paris, ce fut le cas, entre autres, de Jenyfer Rainho, il y a une quinzaine d’années, au restaurant Beirão, de Cláudia Costa au Coimbra do Choupal, tenu par Manuel Miranda, plus récemment de Lizzie et de Tânia Raquel Caetano, au regretté Lusofolies de João Heitor, des lieux aujourd’hui disparus mais qui ont marqué l’histoire du fado parisien, et des interprètes devenues incontournables sur la scène fadiste.

Mais revenons au Portologia et à cette soirée d’après Covid ou apparaît, au moment du Fado vadio, une jeune femme mince, élégante en toute simplicité, pour deux fados (c’est la règle) : voix claire et posée, compasso impeccable, un style personnel teinté d’influences amaliennes et une aisance immédiate dans son contact avec le public, qui l’ovationne. Les musiciens (c’étaient à cette époque Filipe de Sousa et Pompeu Gomes) sont conquis, elle est sur le champ invitée à la prochaine soirée des Affiches : Joana Pereira s’inscrit d’emblée dans notre paysage fadiste.

Native du district de Porto, Joana Pereira n’est pas une débutante dans le fado : «J’avais sept ans quand j’ai chanté le fado pour la première fois devant un public familial et amical, et j’en fus très fière» ; ni une professionnelle au sens institutionnel du terme, désignant celle ou celui vivant principalement de son art.

Enfance et adolescence dans le milieu familial à Valongo, bonne élève à l’école primaire religieuse «très comme il faut» (ou, pour les mécréants, «ce qu’il ne faudrait pas», bonnes études secondaires, où, lors de ses trois dernières années, elle suit un cours et participe à un groupe amateur. L’entrée à l’université lui permet, de s’inscrire au Théâtre universitaire de Porto et d’y suivre une formation en plus de son cursus, de fréquenter les maisons de fado et les nombreuses tertúlias locales, où elle est souvent conviée.

Diplôme en poche, elle commence à exercer la kinésithérapie à Porto, tout en continuant à chanter le fado.

Vient une envie de changer d’air, de découvrir d’autres univers : elle choisit la France, à Nice d’abord («il y avait la mer et le soleil») mais qui ne convient pas à ses aspirations artistiques («pas de fado, un milieu musical étroit»). Ce sera donc Paris, et on connaît la suite, Portologia, les Affiches, le Saudade, d’autres salles à Paris et à proximité. Plus son métier, plus une formation au prestigieux Cours Florent.

Joana Pereira aborde l’année qui commence avec des projets et des questions en tête : «Avec mes expériences au Portugal, puis en France, mes formations à Porto et à Paris, je pense avoir des bases solides pour ce qui concerne le fado et la présence scénique, mais je souhaite toujours progresser. A Paris, le fado ne fournit que très rarement des revenus qui permettent d’en vivre.

Pour les musiciens, ils peuvent compléter leurs revenus du fado en donnant des cours, ou en jouant d’autres musiques (variétés, jazz, musiques latines, folk…). C’est aussi le cas pour quelques vocalistes qui animent des bals ou des anniversaires ou mariages. Mais la plupart exercent un autre métier, et concilier une activité artistique d’un certain niveau avec une autre activité n’est pas toujours facile».

Pour elle, il est important de trouver des textes qui lui correspondent : «Je suis très sensible aux mots, aux sens que la façon de les chanter les mettent en valeur. Renouveler son répertoire, en améliorer sa qualité poétique, son originalité, me paraît très important, et ce n’est toujours pas simple. Par exemple, à Paris, nous avons un nombre de musiciens de fado très limité. Travailler un répertoire suppose des répétitions et les musiciens ne sont pas toujours disponibles, ou parfois peu motivés s’il s’agit de sortir du répertoire traditionnel, ou même de travailler à de nouvelles orchestrations de celui-ci. Bref, c’est difficile, mais on y parvient parfois !».

Cela dit, 2025 ne commence pas si mal pour Joana Pereira puisqu’en janvier, nous aurons la possibilité et le plaisir de l’entendre mardi 7 au Saudade, samedi 11 au Mindelo et vendredi 24 aux Affiches. A ne pas manquer !

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Le mardi 7 janvier

Restaurant Saudade

34 rue des Bourdonnais

Paris 1er

Infos : 01.42.36.30.71

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Le samedi 11 janvier

Restaurant Mindelo

92 rue Broca

Paris 13e

Infos : 01.83.81.95.85

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Le vendredi 24 janvier

Les Affiches

7 place Saint Michel

Paris 5e

Infos : 06.22.98.60.41

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