La Banque Alimentaire : Un des «portraits» de notre monde ?

Les 28, 29 et 30 novembre, comme chaque année à la même période, la Banque Alimentaire était présente dans la majorité des grandes surfaces commerciales, en France comme au Portugal. Pendant ces trois jours, les associations partenaires se mobilisent pour collecter des denrées alimentaires et des produits d’hygiène, destinés aux personnes les plus démunies.

Cette année, nous avons participé à cette collecte avec Luis Gonçalves, bénévole de l’Association Saint-Vincent de Paul de Roubaix depuis douze ans. Cette association distribue des paniers alimentaires deux fois par mois dans le secteur de Roubaix. Notre mission a consisté à être présents à l’Intermarché des Hauts Champs, à charger le camion, collecter des dons dans quatre autres magasins et transporter l’ensemble jusqu’à l’entrepôt régional situé dans le port de Lille. C’est à partir de cet entrepôt que les produits sont redistribués aux associations qui soutiennent les personnes dans le besoin dans la conurbation lilloise.

Cette expérience, bien que marquée par la nécessité sociale, a été pour nous une véritable leçon de vie et une illustration des inégalités qui nous entourent.

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Témoignages et situations vécues

Être à côté des bénévoles de Saint Vincent de Paul de Roubaix nous a marqué, entre autres, par leur solidarité tout en ayant une pensée pour leur Président, Didier d’Halluin, qui a organisé la collecte mais qui pour raisons de maladie ne pouvait être présent pour l’accompagner.

Un autre membre bénévole de l’association, Bruno, bien que lui aussi malade, avec une perte de poids importante, a tenu à venir assister… être dans l’ambiance.

Au cours de la collecte, nous avons rencontré une grande diversité de comportements et de réactions :

– C’est un ramassage de produits pour les animaux ? Non. Alors je ne donne pas.

– À qui vous donnez, ils n’ont qu’à aller travailler.

– Un Monsieur est venu exprès pour acheter un demi-caddie de produits. Il est reparti sans même récupérer le jeton de son caddie.

– Un Monsieur est venu avec deux jeunes enfants, il a rempli le caddie avec eux. Il nous a laissé le caddie et est parti sans même, non plus, récupérer le jeton.

– Un jeune homme a vidé un sac de provisions. Il nous a expliqué qu’il y a peu de temps il était étudiant et il sait ce que c’est ne pas avoir d’argent pour manger.

– Beaucoup de gens âgés se sont plaints de leurs petites retraites.

– Une dame âgée en pleur nous a dit ne pas pouvoir donner.

– Beaucoup nous ont dit : je ne peux donner que ça. On répondait : «donner ce qu’on peut… c’est déjà beaucoup donner»

– À l’entrée du magasin, quelques clients ont demandé ce qu’il fallait acheter.

– Des personnes ont dit : j’ai déjà donné hier, on a donné à l’école, j’ai déjà donné dans un autre magasin, j’ai donné Aux Restaurants du Cœur, etc.

– Dans un magasin, alors que nous chargeons, on a entendu : «allez, on ce casse». Ils étaient à deux. Le temps qu’on réagisse, ils étaient déjà loin. Deux caissières sont sorties, toutefois les deux jeunes hommes voleurs étaient déjà loin.

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Comparée à avant le Covid, la quantité de denrées collectées a diminué pour les 5 magasins que l’association avait en charge : alors qu’on a recueilli jusqu’à 6 tonnes, cette année la collecte s’est limitée à 3,1 tonnes.

Le Président de la Banque Alimentaire du Nord, Patrick Mahieu, est venu soutenir et s’intéresser au déroulement de la collecte à l’Intermarché des Hauts Champs de Roubaix. Les bénévoles lui ont suggéré de modifier la date de la collecte, actuellement fixée à la fin du mois, afin de mieux correspondre aux périodes d’achat et éviter les conflits avec le Black Friday et les dépenses de Noël. Une nouvelle date semble être à l’étude qui pourrait être le deuxième week-end d’octobre.

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Quelques mots de Patrick Mahieu

«En France, la faim n’a jamais cessé d’être une urgence. À quelques jours de notre collecte nationale, nous rappelons que des milliers de Français subissent la précarité alimentaire. En 2024, notre réseau a pu soutenir 2,4 millions de personnes», a déclaré Patrick Mahieu.

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Historique et rôle de la Banque Alimentaire

Une banque alimentaire est une organisation à but non lucratif qui collecte des denrées auprès des supermarchés, producteurs, particuliers et entreprises, pour les redistribuer gratuitement ou à prix très réduit via des associations partenaires.

Le concept de ‘food bank’ est né aux États-Unis en 1967, à Phoenix, grâce à John van Hengel. Inspiré par ce modèle, le premier réseau français a été créé à Paris en 1984, et la Fédération Française des Banques Alimentaires (FFBA) a vu le jour en 1986.

En 2024-25, les Banques Alimentaires françaises ont collecté 128.239 tonnes de produits alimentaires, permettant de distribuer l’équivalent de 223 millions de repas et d’accompagner environ 2,4 millions de personnes, soit 3,5% de la population française. Le réseau compte 111 implantations, plus de 7.700 bénévoles et 618 salariés, et collabore avec plus de 6.000 associations et structures sociales. La grande collecte nationale de fin novembre représente environ 10% des approvisionnements annuels, soit 20 millions de repas.

N’oublions pas, qu’en France, d’autres structures accompagnent les plus démunis, à l’exemple du Secours Populaire, Secours Catholique et Resto du Cœur.

Ces derniers, à titre indicatif, même s’ils ne fonctionnent qu’à une certaine période de l’année, ont distribué pendant la campagne 2024-25, 161 millions de repas et ont accompagné environ 1,3 millions de personnes. Les Resto du Cœur s’appuient sur 75 mille bénévoles réguliers et 30 mille occasionnels. Entre la création des Restos du Cœur, en 1985 par Coluche, et actuellement, le nombre de repas distribués a été multiplié par 20.

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Solidarité également au Portugal

La Fédération Portugaise des Banques Alimentaires (FPBACF) a mené sa collecte nationale en parallèle de son homologue française. Le réseau portugais comprend 21 banques alimentaires réparties sur l’ensemble du territoire (Lisboa, Porto, Algarve, Açores, Madeira, etc.). Les denrées collectées sont distribuées via des associations partenaires, touchant plusieurs centaines de milliers de personnes. La dernière campagne a bénéficié à près de 360.000 personnes en situation de précarité, soit autant qu’en France : 3,5% de la population.

La collecte nationale de la Banque Alimentaire illustre à la fois la solidarité et les besoins persistants dans nos sociétés. Malgré les difficultés économiques et les inégalités, des milliers de bénévoles et citoyens se mobilisent pour soutenir les personnes en situation de précarité, en France comme au Portugal. Cette expérience rappelle que chaque don compte, chaque geste de générosité a un impact concret, et que la solidarité reste un pilier essentiel pour construire un monde plus juste.