Home Opinião Opinion: Plaidoyer pour la Carte PostaleAntónio Marrucho·6 Dezembro, 2018Opinião Je sais, je sais, c’est ringard. Faire un plaidoyer pour la carte postale c’est écrire sur une guerre qui est perdue d’avance… quoique. Eh oui, à l’approche des fêtes, je pense qu’il est utile de réfléchir sur la fonction de la carte postale, la remettre à la mode, au goût du jour. Oui, je sais, à quoi bon, quand on a le portable, les mails, les «faces bouches» qui permettent d’envoyer une information à la seconde près, d’un bout à l’autre de la planète… en plus la carte postale coûte de l’argent. Non, non… La Poste ne m’a pas mandaté… d’ailleurs je donne de l’argent pour le calendrier de La Poste, des pompiers, des éboueurs, toutefois je me pose parfois des questions. Si c’est pour leurs bonnes œuvres, ça va, sinon… pourquoi ne pas inventer le calendrier des assureurs… des banquiers… d’accord, d’accord, d’une façon générale on a plus de sympathie pour les premiers que pour des deuxièmes. Revenons à nos moutons. Oui, je suis pour la carte postale, pour les cartes postales de toutes les couleurs, pas que pour les jaunes. À l’approche de Noël et de Nouvel An, écrivons des cartes postales… et tant pis si l’on fait quelques fautes d’orthographe, le clic droit ne fonctionnant pas. Écrivons, écrivons même si au retour nous ne recevons pas ou peu de cartes postales. La carte postale est unique, même si parfois certaines phrases se répètent: «sincères salutations», «je vous embrasse», «bisous»… Oui, la carte postale c’est une manière différente de dire les choses, c’est bien plus personnel que d’envoyer à 00 heures 00 minutes 01 secondes une Bonne Année à tous les contacts… les opérateurs se frottent les mains, pour eux tous les jours devraient être des 1ers janvier. La carte postale se garde parfois, souvent… pour l’éternité. La carte postale est l’image du monde, d’un monde à un moment donné de l’existence. Je sais, la carte postale occupe de l’espace alors que l’on vous propose des coffres virtuels pour y mettre toutes sortes de documents. D’accord, mettons-y les factures, les impôts, les extraits de compte… en somme tout ce qui est impersonnel. N’y mettons pas la carte postale. La carte postale est personnelle, elle exprime ce qui va dans nos cœurs. Pensons à ceux encore plus âgés que nous. La solitude les ronge, un appel téléphonique leur est agréable, la carte postale aussi. L’appel passe, s’oublie. La carte postale reste. C’est comme la photo qu’on accroche au mur, qu’on peut regarder tout le long d’une semaine, d’un mois, d’une année. C’est être avec celui qui l’a écrit, une liaison vers l’extérieur sa maison, de l’hospice, de la prison, de nos prisons. Écrire une carte postale c’est donner de l’importance à celui qui la reçoit… «eh ban… il est toujours occupé, le temps de rien faire et pourtant il, elle a eu le temps de m’écrire…», et là le subconscient déchiffre: «je dois tout de même avoir de l’importance si on m’écrit une carte postale». La carte postale transmet des informations sur celui qui écrit. Bonnes ou mauvaises, mais elle transmet. Elle transmet le caractère d’une personne, mais aussi, l’état d’esprit à un moment donné: la forme de la phrase, l’inclinaison des lettres, les ratures, le thème abordé, en dit long sur celui qui écrit… difficile de tricher. La carte postale marque les moments importants de la vie, d’une vie. La carte postale fait l’histoire, fait partie de l’histoire. À ce propos de quand date la carte postale? Bon, me voilà dans les problèmes, je les aurai choisis… Il est évident qu’il est plus facile de répondre à la question de l’origine de la carte postale, qu’à la question posée des milliards de fois et, dont je vous avoue ne pas avoir non plus la réponse: «qui est venu le premier au monde: l’œuf ou la poule?» Je vais m’en sortir par une espèce de pirouette: Disons que la carte postale a vu le jour aux alentours des années 1870. Il faut toutefois apporter certaines nuances que nous n’allons pas ici exposer: c’est quoi une carte postale, quelle matière, quel format, etc., etc. Concernant plus ou moins les normes et formats des cartes postales actuelles en voici quelques repères: En 1865, le docteur Heinrich Von Stephan propose un mémoire sur la carte postale, à la conférence de Karlsruhe. En juin 1870, les premières cartes postales circulent en Allemagne et seront employées en grand nombre pendant la guerre 1870-1871. Le 19 décembre 1872, la loi de finances introduit en France de façon officielle la carte postale, même si son utilisation ne se fait qu’a partir du 15 janvier 1873. La carte postale non illustrée est né en France à cette date. Quelques historiens situent la naissance de la carte postale illustrée le 7 octobre 1876 en Allemagne. L’apogée de la carte postale sera le début du XX ème siècle et surtout les années de la guerre 1914-1918. Plusieurs milliards de cartes postales ont été écrites pendant ces années. Les autorités militaires encouragent son utilisation qui facilite le travail de la censure et permet de véhiculer des dessins patriotiques, la carte postale sera utilisée ainsi comme outil de propagande et de guerre de l’information. Parfois on n’écrivait rien: c’était simplement une manière de dire: «je suis encore là… je suis vivant». Ce que l’on montre, ce que l’on a montré sur une carte postale à bien évolué d’une époque à l’autre. On a tout ou presque tout montré sur des cartes postales. Nous viennent ici à la mémoire notre collection de cartes postales des mines et de la catastrophe de Courrière en 1906: on y voit des cadavres, des enterrements… la carte postale comme témoin d’un événement, la carte postale comme contribution pour l’histoire. Chaque carte postale est une pièce d’un puzzle. Elle resserre les liens sociaux et amicaux. C’est peut-être une des plus belles formes de dire à l’autre: «merci». «Merci de ton amitié… merci de ce que tout à fait pour moi… merci de ce que tu pourras faire pour moi». Petite définition de la carte postale: moyen de correspondance écrite qui se présente sous la forme d’un morceau de papier cartonné, en général, de dimensions variables envoyé traditionnellement sans enveloppe, l’adresse et l’affranchissement y étant porté directement aux côtés du message. Selon un sondage fait auprès de 2.000 Britanniques, celui-ci montre que ces dix dernières années la carte postale aurait chuté des trois quarts auprès des jeunes générations. Il est bien loin le temps où l’on guettait le facteur pour sa retraite, pour les bonnes nouvelles et parfois les moins bonnes. Tant pis, je lance le débat. La couleur du gilet? Il reste à déterminer. Le slogan: «écrivons… écrivons… des cartes… oui, des cartes postales».