LusoJornal | António Borga

Opinion : Un Congrès socialiste pour rien ?


Au PS, les congrès se succèdent et se ressemblent beaucoup trop depuis 2018 : sans souffle, même si l’on y chante Bella Ciao à s’en fêler les côtes. On y cherche l’espoir depuis près d’une décennie ou qui pourrait bien l’incarner avant chaque échéance électorale. Introuvable. Où se cache-t-il, ces 14 et 15 juin à Nancy ? Derrière les murs sombres excessivement badigeonnés de lumière rose fluorescente de la Salle du Congrès ? Dans les sections moribondes un peu partout en France et à l’étranger où les baronnies résilientes n’ont rien appris de leur entre-soi fainéant ?

Depuis la «Renaissance socialiste» en 2018 qui criait avoir «acheté» un nouveau logiciel pour tourner la page du social-libéralisme «hollandiste» et de la social-démocratie aux réponses molles face à toutes les graves menaces démultipliées : extrêmes-droites flamboyantes, principes universalistes bafoués, état de droit attaqué, droit international piétiné, droits humains ignorés, guerres déclarées et leur lot de barbaries, le PS manque à tous les appels comme à l’avenir.

Dans cet horizon triste où la République est menacée dans son existence même, à gauche, deux alliances électorales de circonstance (légitimes) en 2022 puis en 2024 n’auront pas porté le PS assez haut pour passer au deuxième tour et gagner une majorité parlementaire. La NUPES et le NFP auront ainsi peu vécu pour rendre l’âme trop tôt.

Bienheureux les statuts du PS qui ordonnent, à échéance régulière, la tenue d’un Congrès pour nous rappeler à l’ordre et honorer la promesse de la République française ayant aboli les privilèges un 4 août 1789 : Liberté, Égalité, Fraternité. Évènement jadis naguère «capital» dans la vie politique de notre pays mais désormais méprisé par nos concitoyens dont nous cherchons désespéramment la confiance perdue.

Dans cette conquête de la confiance perdue, un autre congrès pour rien ? Beaucoup le pensent parmi les plus avisés comme les plus croyants car les ambiguïtés perdurent sur de nombreux points essentiels : l’alliance avec LFI (non, mais…), des débats de bonne facture et des propositions valables mais maintes fois reformulées, ressassées, refoulées sans annoncer des jours plus heureux pour notre pays, des incarnations nouvelles dont l’engagement est sans nul doute honnête mais que les Français.es ne (re)connaissent toujours pas. Un Congrès pour (re)désigner un SG sans doctrine ni idées nouvelles nous relègue bel et bien au statut de petit parti, ce que nous sommes devenus.

Refusant la résignation et afin de redevenir grand, c’est avec espoir que nous proposons de tracer la voie d’un nouveau socialisme autour de trois chantiers essentiels à l’initiative de Philippe Brun, député de l’Eure, soutenus par les militants du Texte d’Orientation C.

D’abord, le PS doit être un parti représentatif de la société en formant et soutenant des candidat.es issu.es des classes populaires, en intégrant l’École de l’Engagement, la première école française de formation politique des classes populaires créée en 2021.

Ensuite, le PS doit travailler à un socialisme par la preuve, en agissant concrètement au service des citoyens. C’est le sens de la création du Service public populaire, une association née en 2024 et qui anime des permanences dans une dizaine de départements. Metz accueillera aussi une permanence prochainement. Créons des universités permanentes pour tisser des liens disparus avec les associations et les syndicats car, à l’écoute, en aidant à la résolution de problèmes concrets, politisant les colères du quotidien, nous aurons une chance de reconquérir les classes populaires et de battre le RN.

La ligne populaire et républicaine est le troisième grand chantier, sans repli sur les formes passées et dépassées de la social-démocratie. Régénéré par les mouvements sociaux du XXIe siècle, dont les Gilets jaunes et les luttes féministes, le nouveau socialisme parlera aux travailleurs, défendra les services publics, saura réconcilier justice sociale et patriotisme économique, en protégeant les industries stratégiques sans tomber dans le piège du nationalisme, sans oublier la transition écologique, une opportunité : celle de créer des emplois durables, de revitaliser les territoires.

Enfin, être socialiste, c’est être féministe (vraiment). Le PS auquel nous voulons continuer d’appartenir se battra pour les mères célibataires, pour l’égalité salariale, contre les discriminations sexistes et fera de la lutte contre les violences faites aux femmes sa priorité.

Ce socialisme-là, loin d’être une relique du passé, reste une nécessité vitale pour l’avenir, pour notre pays. Il s’engagera, à nouveau, avec détermination dans la bataille culturelle perdue. Plus que jamais, nous sommes déterminés à reconstruire un grand parti de gauche sur des bases nouvelles, capable de construire un programme crédible et populaire pour gagner en 2027.

Un congrès pour rien ? Un courant nouveau pour rien ? Résolument non. Le nouveau socialisme est comme le bonheur : une longue patience mais qui a toutes ses chances car des militants «capés» partout en France ont beaucoup et passionnément travaillé. À quoi ? Pourquoi ? À épuiser le doute, à proposer le bon antidote au poison de l’inégalité «Made in RN», à rêver d’une France nouvelle, (re)éprise de justice, et qui saura réellement (re)donné à tous les siens, sans exception, toutes ses chances aujourd’hui sacrifiées à une poignée de privilégiés.

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Nathalie de Oliveira

Partido Socialista

Ex-Deputada no Parlamento português