Sarah da Cunha : « C’est une fierté pour moi de représenter le Portugal »

Défenseure du côté de Grenoble depuis trois saisons, Sarah da Cunha a eu l’occasion d’être appelée en stage du 18 au 20 février dernier avec la Sélection portugaise. Avant d’affronter Lyon ce week-end en Coupe de France, LusoJornal a pu s’entretenir avec elle et aborder le Portugal, sa saison en club mais aussi ses objectifs pour la suite de sa carrière.

 

Pour commencer, quelle a été votre réaction à cette convocation au stage avec la Sélection mi-février ?

Pour ne rien vous cacher, j’ai été très étonnée. Je ne m’y attendais pas. J’avais été appelée une fois avant mais cela remontait à un an et demi. Je n’avais pas perdu cet objectif de vue mais je n’y pensais pas à ce moment-là. Après mon premier stage avec l’équipe A, j’avais enchaîné des blessures qui avaient un peu tué ma saison passée. C’était difficile d’être rappelée dans ces conditions. Aujourd’hui, ça va mieux, je me sens mieux dans mon corps et je me blesse beaucoup moins. J’avais repris un peu de temps de jeu depuis quelques matchs donc ça fait plaisir de voir que même à distance, ils ont pu constater ce progrès rapide. J’en suis vraiment très heureuse et fière.

 

Comment s’est déroulé le stage et ce retour en Sélection ?

C’était un stage de trois jours, donc assez rapide. On était dans un groupe avec que des jeunes joueuses et sans les cadres. Pour la plupart, on avait moins de 22 ans. L’idée était vraiment de voir les jeunes, étoffer son groupe qu’il avait déjà en tête et rajouter quelques filles. Cela s’est bien passé, ça m’a fait du bien de revenir en Sélection, d’être dans « mon pays ». Il y a des infrastructures juste incroyables. Les filles sont quand même relativement accueillantes, donc ça s’est vraiment bien déroulé.

 

Comment s’est passée l’intégration au groupe durant ces trois jours ? Y-a-t-il eu des difficultés au niveau de la langue par moment ?

Ça allait au niveau de l’intégration. On nous a mis ensemble avec les deux autres françaises, donc c’est toujours plus facile. Mais pour ma part, il y avait pas mal de joueuses que j’avais déjà vu lors de mon ancienne Sélection ou avec qui j’avais joué en Sélection des moins de 19 ans. Au niveau de la langue, je suis celle qui maitrise le moins le portugais. J’ai un père portugais, mais une mère tunisienne, donc il y a des mélanges de culture. Forcément, c’est compliqué d’aller parler la langue. J’avais un peu plus de mal, mais heureusement que Rafaela et Mélissa [ndlr : Rafaela Lopes et Mélissa Gomes] étaient là pour m’aider. Mais je continue à progresser et j’essaye d’apprendre la langue au maximum.

 

Le fait de retrouver deux autres portugaises évoluant en France durant ce stage, est-il un plus ?

Comme l’a déjà dit Mélissa, c’est vrai qu’on ne se connaissait pas avant. Rafaela et Mélissa jouent dans le même groupe en D2 Féminine. Moi je suis dans la poule sud avec Grenoble. Mais forcément c’est plus simple quand on parle la même langue, c’est plus fluide, plus rapide. En plus, c’étaient deux personnes avec qui je me suis vraiment entendue. D’ailleurs je félicite Rafaela qui a été prise pour l’Algarve Cup et j’espère que ça continuera plus tard pour Mélissa et moi.

 

Vous avez connu la Sélection en jeunes avec les moins de 19 ans, il y a eu deux convocations en stage avec la A. Intégrer la Sélection reste donc un objectif à court terme ?

Bien sûr. C’est vrai que cela faisait un moment que je n’avais plus été appelée. Personnellement, je n’aime pas exposer à tout va ce que je recherche. Mais évidemment, c’est quelque chose qui est dans un coin de ma tête. C’est une fierté pour moi de représenter le pays de mon père, c’est un pays que j’adore. Et même, pouvoir côtoyer le niveau international reste un objectif et en ayant fait ces stages, on se rend compte que ce n’est pas impossible. Mais cela demande énormément de travail et de patience. Donc même si ça doit se faire plus tard, et je n’en doute pas que ça se fera si on continue à travailler, ça reste un objectif et on travaille très dur tous les jours pour cela.

 

Que pensez-vous justement du fait que le Sélectionneur est décidé de ré-ouvrir la porte aux lusodescendantes évoluant en France ?

C’est flatteur de se dire que, après avoir oublié, on recommence avec des Françaises et on nous prend en Sélection. Maintenant, sur le niveau du Championnat français par rapport à l’Europe, il n’y a pas photo. C’est un Championnat très compétitif qui n’a pas fini de s’améliorer. Donc forcément, quand on a des Françaises qui ont la double nationalité, ils veulent en profiter car le but reste d’avoir la meilleure équipe possible. De notre côté aussi, on essaye de se faire voir au maximum, que ce soit par exemple avec mon équipe de Grenoble en Coupe de France ou alors Mélissa avec le Stade de Reims en Championnat.

 

Parlez-nous un peu de vos origines et rapports avec le Portugal…

Mon père vient du nord du Portugal, d’un petit village que j’adore, qui s’appelle Barrosas et qui se situe à côté de Guimarães. Au-delà de ce lien familial, j’ai un lien sentimental extrêmement fort avec ce pays que j’aime énormément. J’ai même un tatouage du Portugal avec une phrase de l’hymne national. Je suis vraiment fière de jouer en Sélection portugaise. Je suis aussi très fière d’être tunisienne, mais le Portugal, c’est vraiment en moi. J’aime ce pays, ses traditions, les gens qui y sont de ma famille, mon village…

 

En club, quel bilan faites-vous de la saison de Grenoble jusqu’à présent ?

C’est une saison assez particulière. On commence bien en gagnant nos trois premiers matchs en étant très efficaces dans le jeu. Puis, il y a eu un match déclencheur face à Montauban, où l’ont fait match nul en ayant été très mauvaises. Et derrière, on enchaîne huit matchs sans victoire. C’était très compliqué pour nous, on a essayé de chercher ce qui n’allait pas, on a changé de système de jeu. On a enchaîné les mauvaises performances jusqu’à mi-novembre où l’on a trouvé la bonne solution contre Toulouse. Et depuis le 11 novembre, on est invaincues, on se retrouve en demi-finale de Coupe de France. On est parvenues à battre les équipes du haut comme Marseille et Yzeure. On est vraiment sur de bonnes bases désormais.

 

En parlant de la Coupe de France, vous allez recevoir Lyon en demi-finale ce week-end. Comment on aborde un match comme celui-là face à l’une des meilleures équipes européennes ?

Sans mentir, c’est assez compliqué. Autant un match comme Dijon en quarts, ça a été vu comme un exploit mais ça restait des joueuses qu’on pouvait parfois égaler. Autant là, on joue pour moi face à la meilleure équipe du monde qui a gagné je ne sais combien de fois la Ligue des Champions féminine. C’est difficile mais parfois on se surprend à rêver, à se dire « imagine si on arrive à faire un exploit », après tout on ne sait jamais ! On va avoir la chance de jouer au Stade des Alpes, avec du monde, de l’ambiance. Pour nous, ce n’est que du plus et on va y aller le couteau entre les dents et ne rien lâcher. Il y aura peut-être 1-0 ou 8-0 on n’en sait rien, mais ce que je sais c’est qu’on va s’arracher comme jamais et pas juste préparer cette rencontre comme un match de gala. On va rentrer sur le terrain pour gagner.

 

Quels sont les objectifs désormais sur cette fin de saison pour le club ?

Pour Grenoble, on sait que la montée est impossible, on a perdu trop de points en première partie de saison pour la viser. Donc là, l’objectif est simple, c’est une revanche sur nous-même. On veut gagner tous nos matchs et se rattraper de la phase aller. Après, la différence par rapport à d’autres équipes, c’est qu’on a enchaîné beaucoup de matchs de Coupe de France. Mine de rien, on se rajoute six matchs sachant que par exemple le dernier contre Dijon en quart, nous a pris énormément d’énergie, aussi bien mentale que physique. Celui de Lyon risque d’être encore plus usant. Mais comme le Championnat apparait moins intéressant vu que l’on ne vise plus la montée, on met plus de cœur dans la Coupe de France. On reste aussi des compétitrices. Ce n’est parce que l’on n’a plus rien à jouer que l’on va commencer à ne plus rien faire. Au contraire, on veut montrer que notre place était dans le haut de tableau.

 

Et à titre plus personnel ?

Pendant un an et demi j’ai enchaîné pas mal de blessures et de temps de jeu relativement faibles. Cela fait trois mois que je joue beaucoup, j’en suis très contente. Donc mon objectif reste le même, prendre un maximum de temps de jeu, prendre confiance en moi et servir un maximum à l’équipe. Pour la suite, on verra de quoi est fait l’année prochaine.

 

Que peut-on vous souhaiter pour la fin de votre saison et la suite de votre carrière ?

À court terme, on peut me souhaiter déjà du temps de jeu et des bonnes performances pour que je reprenne confiance. Et sur le long terme, souhaitez-moi beaucoup de matchs en première division et pourquoi pas des Sélections avec le Portugal voire même une vraie place en tant qu’internationale portugaise. Ce serait quelque chose d’énorme. Et si on veut vraiment aller loin, souhaitez-moi éventuellement une Coupe d’Europe dans quelques années, ce serait génial (rires). Je veux m’épanouir dans le football. J’ai envie de jouer beaucoup d’années au plus haut niveau, jouer des années en D1. Ça va être hyper complique, mais ce serait génial.

 

 

LusoJornal