Home Cultura Un livre par semaine Un livre par semaine: «Le nom de l’amour», de Nuno JúdiceDominique Stoenesco·20 Fevereiro, 2019Un livre par semaine Nuno Júdice, poète, auteur de fiction, essayiste et traducteur, est né en 1949 en Algarve. Son œuvre, traduite en de nombreuses langues, a été plusieurs fois couronnée. En 1996 il a fondé la revue de poésie Tabacaria et, de 1997 à 2004, il a été Conseiller culturel de l’Ambassade du Portugal et Directeur de l’Institut Camões, à Paris. Actuellement il dirige la revue Colóquio Letras de la Fondation Calouste Gulbenkian. «Le nom de l’amour» (éd. La Nouvelle Escampette, 2018, traduction de Max de Carvalho) est une anthologie composée par Manuela Júdice, réunissant des poèmes de Nuno Júdice publiés entre 1975 et 2015. Dans ce recueil, où la sensualité et le désir imprègnent toutes choses, la poésie, comme l’amour, se cachent derrière les mots les plus simples. Mais une simplicité sans cesse contestée par une cohabitation surprenante entre images et émotions que l’auteur tente constamment à maîtriser. Ici, comme dans son premier livre de poèmes, «A noção de poema», Nuno Júdice mêle aisément un lyrisme très personnel à une théorie de l’acte poétique, comme dans ce long extrait du poème/prose «Art poétique (explication»: «J’établis une distinction entre amour et désir, comme si ces deux choses / n’avaient rien à voir l’une avec l’autre; bercée comme tu l’étais de mots abstraits, de concepts / arides et par les citations des classiques, tes paupières / s’alourdissaient de sommeil, tes cheveux semblaient / plus clairs, comme s’ils empruntaient un éclat tout intérieur / aux lueurs ternes de l’entendement. Pour te réveiller un peu, / je t’ai demandé quel lien existait entre la vie / et le poème. Le doute n’était pas permis: en effet, / les théoriciens tiennent que la poésie est pure imitation, que tout / ce que les mots enserrent n’a rien à voir avec la matière sensible, / avec le réel, avec ce qui nous entoure. Or, / à l’inverse de ce qu’ils avancent, ta réponse / suggérait que vie et poésie participent dune / essence commune. J’aurais dû te reprendre. Seules les certitudes scientifiques / font avancer le monde, et non ces erreurs / auxquelles nous tenons tant».