Vieille Chapelle : Hommage à deux femmes françaises, bien plus que des témoins de la Bataille de La Lys


Il y a des histoires qui surgissent ou qui sont mises en évidence, «qui voient la lumière du jour» bien après le moment où elles ont eu lieu. L’histoire que nous allons vous raconter et que nous avons reconstituée, est le fruit des recherches, trouvailles de passionnés par le thème de la participation portugaise à la I Guerre mondiale.

Un simple nom sur un document datant de l’époque et faisant référence à un lieu, nous a permis de reconstituer l’histoire, la belle histoire.

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Dans le document, authentifié par le Lieutenant Amadeu Humberto de Sá Moraes (1) on peut lire : «…uma cruz, sem inscrição, modelo Alemão de tipo médio. Fica situada a N.E. da Ferme de Mme Dumur… declarações de Mme Dumur : diz que no dia 9 de abril se conservou ali até às 14 horas. Deixou um sargento e dois soldados na cave que ela própria pensou e socorreu até à data em que se retirou. Não sabe a que unidade pertenciam, um deles estava ferido, não sabendo o que foi feito deles», que nous pouvons traduire par «…une croix, sans inscription, modèle allemand de type moyen. située au N.E. de la ferme de Mme Dumur… déclarations de Mme Dumur : elle raconte que, le 9 avril, elle est restée chez elle jusqu’à 14 heures. Elle a recueilli dans la cave un sergent et deux soldats. Elle a porté des soins jusqu’au moment de son départ. Elle n’a pas su à quelle unité ils appartenaient, l’un d’eux a été blessé, elle n’a pas su ce qui leur est arrivé par la suite».

Grâce à des recoupements et consultations de diverses sources, notamment archives département du Pas de Calais et arbres généalogiques, nous ont conduit à la seule famille du nom de Dumur, dans le village de Vieille Chapelle (2) (3).

Clémence Joseph Ducroquetz, est née à Neuf-Berquin (arrondissement de Dunkerque), le 24 août 1876. Elle s’est mariée avec Louis Dieudonné Dumur, né le 28 septembre 1870 à Robecq (arrondissement de Béthune). Le mariage a eu lieu le 07 juin 1806 à Neuf Berquin.

Le couple a changé de domicile, venant habiter, maison 8 rue Loisne à Vieille Chapelle où, semble-t-il, est né le seul enfant du couple, Suzanne Flore Dumur, née le 30 novembre 1909.

Le recensement du village de 1921 confirme la présence du couple, de sa fille et d’un domestique nommé Fruleux Hermant, au 8 rue Loisne, à Vieille Chapelle. À partir du recensement, nous avons la confirmation que Louis Dumur était un patron cultivateur.

Suzanne Flore Dumur, la fille du couple se mariera le 10 septembre 1930 à Richebourg avec Isidore Joseph Fénart, cultivateur demeurant à Lestrem.

Au moment du mariage de Suzanne, toute la famille Dumur habitait à Richebourg, toujours cultivateurs.

Suzanne Flore Dumur est décédée à l’âge de 77 ans, le 27 avril 2014 à Richebourg.

Bien des histoires, comme celle que nous venons de rappeler, auraient à raconter, à faire revivre. Celle de Mme Dumur a le mérite d’avoir été transcrite à l’époque, et qu’elle ait été dénichée récemment par un passionné.

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Dans la continuation des dires de Mme Dumur, une autre dame va donner des informations précieuses – Mme Lemire (aussi écrit Lemirre) – informations dans le rapport de recherches de corps de soldats portugais à Neuve Chapelle, quartier Huit Maisons, rapport signé par le responsable de la section sanitaire n°1. Dans le dit rapport, on peut lire que «…dans la cour de la ferme Lemire, une sépulture avec une croix sans inscription – on a procédé à la recherche et on a trouvé un corps, vérification faite c’est un portugais par la couleur de l’uniforme et surtout par l’équipement… Selon information de Madame Lemire, dans cette ferme était présente le 9 avril 1918 la ‘3ème Compagnie d’Usines du Génie’, que supposons être la 3ème Companhia de Sapadores Mineiros, 3ème Compagnie des Sapeurs Mineurs – cette information coïncide avec des informations fournies par de soldats qui étaient à Vieille Chapelle à la même date. Une autre femme française qui habitait dans la même ferme, a dit que là est mort un soldat portugais le 9 avril 1918».

Recherches faites, Mme Lemire avait comme nom de naissance Germaine Evrad, elle est née à Vieille Chapelle en 1882, s’étant mariée le 5 septembre 1906 dans son village avec Éloi François Jean Baptiste Lemire, originaire, quant à lui, de Lestrem où il est né en 1882.

En consultant les recensements, on s’aperçoit que les Lemire habitent à Lestrem et Richebourg, aucun à Vieille Chapelle, ce qui nous fait conclure que la dame qui a donné les informations à la Commission sanitaire est bien Germaine Evrard, Lemire par le mariage. L’autre dame qui a confirmé le décès d’un soldat portugais et qui habitait la même ferme devait être la maman de Germaine, Marie Julie Briche, épicière.

Petite curiosité : le papa de Germaine s’appelait Augusto Joseph Evrard ayant comme profession forain et le mari de Germaine dans le recensement de 1911, il est indiqué comme profession cabotin (comédien), tout les deux devaient se fréquenter sur les foires.

Notons que le couple Germaine Evrard et Éloi Lemire apparaissent dans le recensement du village qui colle à Vieille Chapelle, Richebourg Saint Vaast, maison 3 de La Place, où ils ont eu deux enfants en 1907 et 1909, respectivement André et Hélène.

La ferme Lemirre à Vieille Chapelle était située à la maison 4 de la rue de la Croix.

Il est très probable que le sergent et les deux soldats cachés dans la ferme de Mme Dumur le 9 avril 1918 faisaient partie de la 3ème Companhia de Sapadores Mineiros, d’autant plus qu’entre les deux fermes, celle de Mme Dumur, rue Loisne et rue de la Croix, ferme Lemire, il n’y a qu’un pâturage, les deux rue sont parallèles.

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Par cette histoire, c’est un hommage que nous rendons à Mme Dumur, née Ducroquetz Clémence, car au mépris du danger pour sa propre vie, elle a aidé, trois membres du Corps Expéditionnaire Portugais à s’extraire d’une situation de danger de mort, voire de se faire prisonniers. Hommage aussi à Mme Lemirre et à sa maman qui ont eu dans leur cour un soldat portugais enterré, leur témoignage ayant permis son exhumation et son réinhumation au Cimetière militaire portugais de Richebourg.

Les deux documents recueillis auprès des Arquivos Históricos Militares nous ont permis de raconter l’histoire, de contribuer pour l’histoire, un exemple parmi tant d’autres qui restent à raconter.

Du cimetière de Vieille Chapelle, 532 corps de soldats portugais ont été exhumés et réinhumés au Cimetière de Richebourg. Le cimetière britannique de Vieille Chapelle, était dans un premier temps, un des cimetières où l’on enterrait les soldats portugais du CEP. La première exhumation des corps de ces soldats, à Vieille Chapelle, a eu lieu le 18 avril 1923 et la dernière le 16 juin 1925.

Hommage ici est rendu à Mme Dumur et à Mme Lemire et, à travers elles, à tous les autres, qui resteront anonymes dans l’histoire. Merci à eux.

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Notes :

(1) Le lieutenant milicien Amadeu Humberto de Sá Moraes faisait partie de la Commission portugaise des sépultures de guerre, en représentation des services de l’Administration militaire. Il a été nommé pour faire partie de cette Commission le 24 juin 1919. Il a été loué par ses supérieurs par son action dans les tranchées où il a fait service longtemps, par manque d’Officiers dans le CEP.

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(2) De noter que le soldat inconnu portugais décédé le 9 avril 1918, lors de la Bataille de La Lys, enterré dans la salle du Capítulo au Monastère de Batalha, a dans un premier temps été enterré dans le cimetière de Bacquerot (Laventie) avant d’être réinhumé le 24 mars 1921 au cimetière de Vieille Chapelle et dépose définitivement le 10 avril 1921 à Batalha. Le Lieutenant Amadeu Humberto de Sá Moraes a fait partie des signataires du document exhumant le corps du soldat inconnu au cimetière de Vieille Chapelle, avant son départ pour le Portugal.

(3) https://lusojornal.com/

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