Home Comunidade Gand rend hommage aux soldats portugais de la I Guerre mondiale : une cérémonie marquée par l’émotionAntónio Marrucho·18 Novembro, 2025Comunidade La ville de Gand, en Belgique, a accueilli, ce dimanche 16 novembre, une cérémonie d’hommage dédiée aux soldats portugais tombés lors de la I Guerre mondiale. L’événement, désormais bien ancré dans le paysage commémoratif gantois, a été initié en 2018 par Bruno Joos de Ter Beerst, alors tout juste nommé Consul honoraire du Portugal à Gand. C’est près de la plaque commémorative du Corpo Expedicionário Português (CEP), située au 21 Korenlei, que le public et les personnalités présentes se sont recueillis. Ce rendez-vous, commencé modestement il y a six ans, a peu à peu pris de l’ampleur. L’édition 2025 a eu une résonance particulière : elle constituait la dernière cérémonie organisée par son fondateur, aujourd’hui retraité, bien qu’il reste Président de la Liga dos Combatentes de Gand. . De nombreuses personnalités présentes L’hommage a débuté à 14h00 par les discours des personnalités après quoi un dépôt de gerbes a été effectué par les autorités civiles et militaires. Parmi les personnalités présentes figuraient António Costa Moura, Ambassadeur du Portugal en Belgique (qui est déjà passé par l’Ambassade du Portugal à Paris), le Lieutenant-général Paulo Mateus, représentant militaire du Portugal auprès de l’OTAN (qui a aussi été Attaché de Défense à Paris), le Colonel Geert Loier, Commandant provincial de Flandre orientale, Christophe Peeters, Président du Conseil communal de la Ville de Gand, Bruno Cavaco, Consul honoraire du Portugal à Lille, Jérôme Dumulier, Maire de Richebourg, des membres de la Liga dos Combatentes da Ponte de Lima, ainsi qu’une trentaine de militaires portugais et plusieurs représentants civils et militaires. La cérémonie s’est poursuivie par un moment de convivialité autour d’un cocktail, propice aux échanges amicaux et aux partages de souvenirs. . Un organisateur passionné par l’histoire belgo-portugaise Bruno Joos de Ter Beerst (lire ICI et ICI), instigateur de cet hommage annuel, est un fervent admirateur de l’histoire portugaise. Installé au Portugal avec ses parents au moment de la Révolution du 25 avril 1974, il raconte volontiers que c’est à sa sortie d’une boîte de nuit lisboète qu’il fut témoin des premières heures de la Révolution des Œillets, symbole d’autant plus saisissant que sa famille cultivait alors ces fleurs, largement exportées. Passionné par les liens historiques entre le Portugal et les Flandres, et en particulier avec Gand, il a publié en 2021 et 2022 deux études consacrées à «Les Portugais et la I Guerre mondiale en Belgique». Il a également traduit du français au néerlandais un ouvrage consacré au Consul Aristides de Sousa Mendes, figure historique qui fut auparavant Consul à Anvers et dont les enfants ont étudié à l’Université de Louvain. . Un devoir de mémoire enraciné dans l’histoire L’hommage gantois s’inscrit dans une longue tradition. Historiquement la plaque commémorative a été inaugurée à Gand par l’Ambassadeur du Portugal, Vasco de Quevedo, le Général Donies et le Comte Penha Garcia qui ont dévoilé la plaque commémorative le 21 juillet 1928, à l’initiative du Cercle d’Amitié Belgo-Portugaise. Le journal flamand De Volkstem, dans son édition des 23 et 24 juillet 1928, relatait déjà l’inauguration d’une plaque commémorative en honneur des soldats portugais tombés lors des combats de 1918 sur les rives de la Lys et de l’Escaut. Il écrivait : «Inauguration d’un mémorial à Gand – Pour les Portugais tombés au combat: samedi 21 après-midi dans la ville de d’Artevelde (*) a eu lieu, grâce au Comité des amis belgo-portugais, l’inauguration d’une plaque commémorative pour les soldats portugais tombés au combat sur les rives de la Lys et de l’Escaut, lors de l’offensive de 1918. Les troupes portugaises ont participé à de nombreuses batailles en Flandre : la deuxième Division de l’Armée en particulier s’est distinguée le 9 avril 1918 lors de la Bataille de la Lys. Le corps portugais perdait 73 officiers, 107 sous-officiers, 2018 caporaux et soldats ; au total 2.288 morts, dont 1.633 sont enterrés en France et 71 en Belgique…». En effet, l’histoire du Corps Expéditionnaire Portugais après la Bataille de La Lys, se poursuit, en partie en Belgique, et ce jusqu’à l’Armistice, voir jusqu’en 1919, avec le rapatriement des troupes et au-delà, avec les exhumations en Belgique et réinhumation à Richebourg d’une bonne partie des soldats portugais du CEP décédés en Belgique. Des soldats portugais ont intégré la 47ème Division britannique qui a eu pour mission d’occuper la rive ouest de l’Escaut au nord de Tournai, c’est le cas d’un groupe d’artillerie portugais : les deux Bataillons d’infanterie IV et V (dont la base était respectivement l’ancien BI 23 et BI 35 – ancien Bataillon de Coimbra). Les pelotons des 35 ont suivi l’itinéraire suivant : Lille, Templeuve, Pont-à-Chin, Mont St. Aubert, Melles, Quartes, Frasnes-lez-Anvaing et Moustier. La compagnie BI 23 la plus avancée est arrivée à Froyennes au nord-ouest de Tournai (le 8 novembre) et le 9 novembre, les Portugais du Bataillon de Coimbra ont également traversé l’Escaut à Tournai, mais n’ont pas combattu plus à l’est. Notre 4ème Groupe d’Artillerie (4ème GBA de Santarém / Vendas Novas) avance de Lille jusqu’au village d’Ascq, puis passe par Estafflers et atteint le Mont Garni (Ouest de Tournai). Dans les derniers jours de la guerre, les quatre unités d’infanterie (les BI 14, BI 15, BI 23 et BI 35) étaient situées à l’ouest de Tournai, les sept batteries d’artillerie (cinq batteries de la 4ème GBA et deux de la 3ème GBA), une unité de sapeurs et une autre des pionniers, qui ont soutenu les Britanniques dans l’ouverture d’itinéraires et dans la construction de passages sur les rivières, que les Allemands avaient détruits lorsqu’ils se sont retirés. Les seuls militaires portugais qui ont avancé au-delà de l’Escaut étaient des militaires de la BI 35 et du personnel du Corps d’artillerie lourde (CEP/CAP) qui ont été intégrés dans les quatre batteries lourdes britanniques positionnées à Leuze, à Pommereul (ouest Mons), un autre à Bury (au nord de Peruwetz) et un autre à Roumilies (à l’est de Tournai). . Les victimes portugaises en Belgique Selon les travaux de Patrick Rapoye et Christine da Costa, au moins 74 soldats portugais sont morts en Belgique et furent initialement inhumés sur le territoire belge. La plupart ont été exhumés et transférés au Cimetière militaire portugais de Richebourg, en France. Christine da Costa et Patrick Rapoye, par leurs recherches, ont listé les victimes portugaises en Belgique, dont 6 n’ont pas été identifiées. Ces victimes furent initialement enterrés à : 7 à Anvers, 1 à Ath, 1 à Bruges, 2 à Dranouter, 1 à Evere, 1 à Gand, 4 à Hasselt, 1 à Ixelles, 4 à Leuze, 3 à Liège, 14 à Malines, 2 à Moustier (Frasnes-lez-Anvaing), 6 à Ninove, 4 à Pamel, 2 à Templeuve (Néchin), 17 à Tournai, 3 à Vilvoorde et une victime dans un lieu inconnu quelque part en Belgique. De noter que les 7 soldats enterrés à Anvers, dont deux inconnus, n’ont pas été rapatriés vers Richebourg. Ils sont restés dans le carré portugais du cimetière de la ville. . Un hommage appelé à perdurer La cérémonie de ce dimanche, à laquelle LusoJornal a assisté, ne marque pas la fin de cet hommage annuel. Malgré son retrait de l’organisation, Bruno Joos de Ter Beerst a d’ores et déjà assuré la continuité, rendez-vous étant pris pour le 14 novembre 2026, pour cette cérémonie destinée à perpétuer la mémoire des soldats portugais tombés en Belgique et en France pendant la Grande Guerre. . (*) Jacques ou Jacob van Artevelde est né à Gand vers1290 et mort dans la même ville en 1345.