L’entreprise Charles Vieillard / Fernand Touzet a façonné une partie de Lisboa

L’entreprise Charles Vieillard & Fernand Touzet a sans nul doute été une de celles qui a le plus marqué le paysage urbain-industriel de Lisboa fin du XIX – début du XXème siècles.

Ce qu’ils ont construit caractérise une époque où, même le commercial et l’industriel expriment l’art, la grande nouveauté étant l’utilisation du fer, la brique, donnant aussi une grande importance à la lumière tamisée par de beaux vitraux, un style plus esthétique, avec des lignes courbes qui se démarque de la construction industrielle jusqu’à ce moment. Un style qui prendra comme nom : l’Art Nouveau.

Font partie du leg de l’entreprise Vieillard Touzet, dont un récent vote de la municipalité de Lisboa a celé l’effectuation de son ex-siège (lire ICI) : la Central Elétrico Tejo, Garagem Auto Palace, Aquário Vasco da Gama, A Napolitana…

Le siège de l’entreprise Charles Vieillard & Fernand Touzet a été construit en 1888, 15-17 rua dos Lusíadas, dans le quartier de Alcântara.

On était dans la période où Gustave Eiffel construisait certains des ponts ferroviaires du Portugal (lire ICI).

Mais qui étaient ces deux français débarqués à Lisboa au XIXème siècle ?

Charles Louis Vieillard est né le 29 septembre 1850 à Saint-Benoît-du-Sault (Indre), son père Jean Baptiste Louis Vieillard né et meurt dans le même village. Ce dernier a exercé la profession de tailleur de pierre, ce qui a probablement eu son influence sur le métier de son fils : entrepreneur dans le bâtiment.

Charles Vieillard se marie à Maria dos Santos Costa, avec laquelle il aura 3 enfants. Il meurt à Lisboa le 27 juillet 1911, il est enterré au Cimetière des Prazeres, jazigo n°5877. À Lisboa il aura vécu au 52 rua das Janelas Verdes.

Fernand Eugène Victor Touzet est né le 28 septembre 1864, dans le même village que Charles Vieillard, Saint-Benoît-du-Sault (Indre). Il se marie le 26 octobre 1889, dans ce même village, avec Adèle Marie Vieillard. Dans l’acte de mariage il est déclaré comme habitant, déjà, à l’époque au Portugal. L’épouse de Fernand Touzet était sœur de Charles Vieillard, son associé.

Par l’acte de mariage entre Fernand Touzet et Adèle Marie Vieillard, on apprend que cette dernière est née au Portugal, autrement dit, le premier à migrer vers le Portugal fut le père de Charles Vieillard, sa fille Adèle y étant née le 22 janvier 1863. Fernand Touzet est décédé le 5 septembre 1929 à Vichy (Allier).

Charles Touzet, par décret du 9 mai 1919, est nommé Chevalier de la Légion d’Honneur. Membre de la ‘Chambre du Commerce Française au Portugal’ depuis 1899. Il a occupé différents postes : Trésorier de 1903 à 1907, vice-Président de 1907 à 1910, Président de 1910 à 1920. Charles Touzet a également été membre fondateur de la société ‘Ecole Française de Lisbonne’, étant son Trésorier pendant 6 ans. Il a par ailleurs occupé la fonction de délégué du ‘Comité Anglo-Franco-Belge’ au Portugal de secours aux blessés militaires de la guerre 1914-1918.

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Parmi les bâtiments notoires construits par l’entreprise Charles Vieillard & Fernand Touzet :

L’Aquarium Vasco da Gama. Situé proche du Tage, a été conçu dans le cadre des commémorations du IVème centenaire de la découverte de la route maritime de l’Inde. L’aquarium a été inauguré en 1898, en présence du roi D. Carlos I. La direction technique a été confiée à l’ingénieur français, Albert Girard, naturaliste remarquable et principal collaborateur scientifique du roi D. Carlos.

Au moment de la construction, le bâtiment se composait d’un seul étage, qui comprenait la salle d’entrée, la salle du musée, les couloirs de l’aquarium d’eau salée et la salle de l’aquarium d’eau douce, desservis par des galeries intérieures et complétés par des salles de service. En 1917, débute la construction d’un étage au-dessus de la façade principale du bâtiment, donnant naissance à une grande salle, l’actuelle Salle Noble. En 1940, à la suite de la construction de la route marginale Lisboa-Cascais, le bâtiment fut amputé d’environ un tiers de sa surface, perdant la zone des laboratoires, la bibliothèque, les entrepôts et les cuves de culture. Dans les années 60 et 80, des travaux d’agrandissement et de restauration ont été réalisés, donnant au complexe une conception muséale moderne, soutenue plus tard par une cafétéria et un auditorium, renforçant le rôle pédagogique toujours assumé par l’Aquarium.

L’Aquarium Vasco da Gama est l’un des plus anciens musées aquariums du monde, dépositaire de la précieuse collection océanographique de D. Carlos I et abritant des milliers d’espèces dans le musée et plus de 300 espèces marines vivantes, tortues et oiseaux aquatiques, dont de nombreux animaux de la côte portugaise.

Le classement de l’Aquarium Vasco da Gama, y comprenant le jardin, reflète son intérêt en tant que témoignage remarquable d’expériences et de faits historiques, de sa valeur esthétique, technique et matérielle intrinsèque, de sa conception architecturale et urbaine.

L’Aquarium Vasco da Gama est situé rua Direita do Dafundo, n°18, à Cruz Quebrada.
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Le Garage Auto Palace est créé en janvier 1905, rue Jardim do Regedor, à Lisboa et est propriété de la Sociedade Portuguesa de Automóveis, Lda. dont l’un des associés était Charles Bleck.

Les locaux de la rue Jardim do Regedor sont trop petits, un bâtiment Auto Palace est construit rue Alexandre Herculano (O Rato), début en 1906. C’est le premier garage construit spécifiquement à cet effet au Portugal. L’œuvre a été conçue par Gustave Eiffel, la construction revenant à l’entreprise Charles Vieillard & Ferdinand Touzet. Ce bâtiment est l’un des rares exemples de façade en fer et en verre à Lisboa. L’inauguration a lieu en 1907.

Auto Palace porte bien son nom : les vitraux sont là, un à chaque extrémité du bâtiment, célébrant, à travers l’art, «le véhicule le plus rapide, le plus confortable et le plus élégant que l’homme ait inventé jusqu’à présent», comme le journal O Século écrit le 5 juillet 1907, au moment de l’inauguration.

Les vitraux ont été commandés en 1907, pour décorer la salle de lecture et le bureau de direction, au peintre et maître vitrail Cláudio Martins, largement responsable de la récupération de cet art à Lisboa au début du XXe siècle.

La brochure «Auto Palace, un siècle de vie», d’Auto Industrial, propriétaire du bâtiment, nous raconte que les vitraux ont inspiré Fernando Pessoa pour créer le poème de son hétéronyme Álvaro de Campos «Au volant de la Chevrolet, le long de l’Estrada de Sintra». Réalité ou légende ?

Après un investissement de 4,5 millions d’euros, l’espace abrite désormais le nouveau magasin Continente Bom Dia, s’ajoutant au dernier étage, le parking pouvant accueillir 37 voitures, dont quatre places pour véhicules électriques. La nouvelle zone commerciale a également un aspect culturel, avec un petit musée qui raconte l’histoire de ce bâtiment historique.

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La Central Tejo construit en 1908, par Charles Vieillard et Fernand Touzet, fut le principal fournisseur d’électricité de la ville de Lisboa pendant une partie du XXe siècle. Dans cette ancienne usine de production, le fer et la brique forment une symbiose compositionnelle et structurelle qui génère une imagerie forte associée à l’identité du bâtiment.

La Centrale électrique de Tejo est un exemple paradigmatique de la capacité du fer à se transformer au fil du temps. Depuis sa fondation en 1909, l’ensemble immobilier a connu quatre phases de transformation qui ont formellement modifié cette typologie de la genèse industrielle, bien que toujours en corrélation avec le fer et la brique. Sa capacité structurelle permettait systématiquement la construction de grands espaces, par addition, pour maintenir le système fonctionnel nécessaire à la production jusqu’à son adaptation actuelle en espace muséal.

La Centrale Tejo, n’est plus centrale électrique depuis 1951, elle est déconnectée du réseau depuis 1972.

Si l’on visite ce musée on pourra voir les générateurs et le système de condensation de l’eau qui se trouve dans l’immeuble en briques plus à l’ouest. Pour y accéder on passe devant une curiosité : une petite voiture orange. Il s’agit de la première voiture électrique au Portugal. Elle était en possession des CRGE (Companhias Reunidas de Gás e Electricidade), la société gérante de la Central Tejo. La petite voiture pour deux passagers était construite en Grande Bretagne par Enfield Automotive of London entre 1973 et 1978. Vitesse maximum 64 km/h et autonomie de 40 à 90 km. Le logo est une forme stylisée du canon de Royal Enfield. Quand les CRGE chargeaient les batteries de cette voiture, c’était avec de l’électricité produite au charbon !

La Central Tejo est située Avenida da Basilia à Lisboa.

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La Napolitana conçue par le duo de constructeurs et designers français Vieillard & Touzet, reste à ce jour comme une référence de l’architecture industrielle portugaise du début du XXe siècle dans la ville de Lisboa.

Le complexe industriel de pâtes du même nom a été construit en 1908 dans le bloc formé par la rua Maria Holstein, la rua da Cozinha Económica et la travessa Teixeira Júnior (Alcântara). En 1926, l’usine est acquise par la Companhia Industrial de Portugal e Colónias (CIPC), qui reste en activité jusqu’en 1970.

Ces installations ont été acquises auprès du groupe Auchan par un consortium international d’investisseurs composé des sociétés RFR Holding LLC, CGC et Artemis Education. Ce sera la première école du groupe Artémis Éducation dans la ville de Lisboa.

Le projet d’installation scolaire prévoit le maintien de l’ensemble de quatre bâtiments qui composent l’ancien complexe industriel, d’une superficie totale de 12.000 mètres carrés, et la préservation des façades d’origine, uniques représentantes de l’architecture industrielle portugaise du début du XXème siècle.

L’intérieur des propriétés sera entièrement rénové pour le moderniser et l’adapter au fonctionnement de l’établissement éducatif, la construction d’un nouveau bâtiment étant également envisagée. L’activité repose sur un contrat de location à long terme.

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Nous avons ici fait référence à 4 des constructions emblématiques de l’entreprise Charles Vieillard & Ferdinand Touzet à Lisboa. Il est heureux de constater que les bâtiments ont été réhabilités ou sont en train de l’être, avec un souci et exigence de préserver le passée, la richesse structurelle. Bâtiments qui deviennent des lieux qui attirent le touriste, car témoignant d’un passé, d’un style, d’une époque.