Francis Vauban

Pedro Lima, l’âme franco-portugaise de la science racontée

Parmi les visages de la vulgarisation scientifique en France, celui de Pedro Lima se distingue par une passion contagieuse, une plume rigoureuse et une trajectoire marquée par une double culture franco-portugaise qui irrigue chacun de ses projets.

Né le 16 août 1968 à Aix-en-Provence, Pedro Lima est le fils d’une mère française et d’un père portugais originaire de la région de Porto. Il a grandi à Marseille, où il vit toujours aujourd’hui. «Je me sens 100% portugais et 100% français», confie-t-il au LusoJornal. Son lien avec le Portugal s’est surtout noué au fil des étés passés là-bas, mais aussi à travers une courte expérience de vie dans le pays, peu après la Révolution des Œillets : «C’était la seule vraie expérience de vie au Portugal, car c’est plutôt un lien estival que je garde avec ce pays».

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Une fascination précoce pour les sciences

Très jeune, Pedro Lima est attiré par le vivant. «Au lycée, la matière qui m’attirait le plus, c’étaient les sciences naturelles. Il y avait une fascination autour de ça. C’était un lien avec la nature». Il choisit alors de se tourner vers les neurosciences du comportement, une voie exigeante qu’il poursuivra jusqu’à l’obtention de son diplôme en 1992.

Mais très vite, une autre passion l’appelle : celle de l’écriture, de la transmission, du récit. En 1994, il intègre la nouvelle filière «Journalisme et sciences» de l’École Supérieure de Journalisme de Lille. Un choix fondateur : «Le journalisme scientifique m’a permis de rester en contact avec la recherche scientifique et cette envie de comprendre».

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Un reportage marquant dans la vallée de Côa

En 1995, Pedro Lima part au Portugal pour un reportage qui marquera sa carrière. Direction la vallée du Côa, à Vila Nova de Foz Côa, où un vaste site d’art rupestre préhistorique vient d’être découvert. «C’était un reportage fascinant, avec des gravures d’animaux magnifiques dans un cadre naturel exceptionnel, et une mobilisation sociale exemplaire pour sauver ce patrimoine à l’époque menacé par la construction d’un barrage hydroélectrique, et classé depuis par l’Unesco», se souvient-il. Un travail reconnu internationalement car Pedro Lima a été l’un des premiers journalistes étrangers à couvrir ce sujet. Il se souvient qu’à l’époque le «débat était très vif, très intense. Le choix était entre protéger le patrimoine et la découverte de ces gravures ou alors penser au développement économique».

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Un bistrot pour faire parler la science

Trois ans plus tard, en 1998, il crée à Marseille un espace de rencontre inédit entre le public et les chercheurs : le Bistrot des sciences. «C’était un lieu de partage de connaissances. Le but était de transmettre la connaissance scientifique dans un format convivial». Le projet se prolonge à la radio, avec l’émission «Étincelles» sur Radio Grenouille, avec la même volonté de rendre la science vivante, proche et accessible.

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Synops : des livres et des expos pour tous

Toujours en quête de nouveaux formats, Pedro Lima fonde en 2012 avec des collègues les éditions Synops, une structure dédiée à la conception d’expositions multimédia et à la publication d’ouvrages de vulgarisation scientifique. Il y publie «La grotte Cosquer» révélée en 2022, une plongée passionnante dans un chef-d’œuvre d’art pariétal englouti, saluée par la critique et récompensée du Grand Prix du livre d’archéologie.

Son travail éditorial explore en profondeur la préhistoire et l’art pariétal, avec des titres phares comme «Chauvet-Pont d’Arc, le premier chef-d’œuvre de l’humanité» (2014), qui revient sur la découverte de la célèbre grotte ornée, «Tout Lascaux» (2016), coécrit avec Yves Coppens et illustré par son ami et collègue Philippe Psaïla, qui lève le voile sur les secrets de la grotte emblématique périgourdine qu’il a eu la chance de visiter en 2000 et 2010.

Mais aussi «Le trésor des grottes ornées» (2023), une synthèse des découvertes majeures en Europe, et «Paléo Kids, l’enfance de l’humanité» (2024), une enquête inédite sur la place des enfants dans les sociétés paléolithiques, inspirée notamment des empreintes retrouvées dans la grotte de Gargas… Un ouvrage grand public qui vient d’être retenu pour le prix du Livre de science des lycéens.

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Un passeur de savoirs engagé

Aujourd’hui, Pedro Lima partage son expérience à travers des livres, expositions et conférences. Discret sur son identité lusophone, il n’en incarne pas moins un parcours rare, celui d’un homme qui a su faire dialoguer les disciplines, les cultures et les langues. «Le journalisme scientifique, ça m’a permis de traiter des sujets variés et de rencontrer des gens passionnés et passionnants», résume-t-il. Une phrase simple, mais qui dit tout : l’envie de comprendre, de raconter, de relier.