Home Opinião Opinion: La fête au Portugal: entre tradition et renouveauAntónio Marrucho·24 Julho, 2018Opinião Les vacances sont là, les vacances approchent, occasion pour aller au pays, pour se ressourcer après une année de labeur, une année loin du village natal, de la maison construite avec les économies engrangées de ce côté-ci. Visite au pays, visite au Portugal pour «matar saudades» partagées avec amis et parents. Le Monde change, le Portugal change, quelques traditions font de la résistance, même si parfois elles ont perdu en partie leurs caractéristiques premières. Dans la Beira Baixa on continue à allumer le feu le 24 décembre, connu sous le nom de «Madeiro». Ce sont les «Juntas de Freguesia» qui l’organisent, alors qu’il était le devoir, dans un passé récent, que cela soit fait par les jeunes gens qui allaient à «inspecção» dans l’année. Le traditionnel plat de morue, pomme de terre et choux, est loin d’être resté la règle. Selon la région du pays, on mangera «filhoses», «rabanadas», «formigos», «aletria» ou plus généralement «Bolo Rei». Encore de nos jours, même si cela devient moins vrai, le Portugal est caractérisé comme étant le pays des F: Famille, Football, Folklore, Fátima, Fado… Mais tout cela n’est-il pas en train de se perdre? Citons ici le cas de la réligion et des fêtes. Du petit village à la grande ville, des fêtes en honneur des Saints et de Marie, étaient organisées le plus souvent pendant les mois d’été, lors de la venue des émigrés. Le bénéfice de ces festivités était partagé entre organisations profanes et religieuses. Le clergé décrétant que tous les bénéfices des dites fêtes devaient leur revenir, beaucoup de ces manifestations ont perdu de leur popularité, voire disparaissent. Pour pallier cette contrainte et afin de créer des lieux de rencontres et ainsi dynamiser un village, une ville, le tissu économique, de nouvelles fêtes apparaissent, ayant souvent pour thème ou déclencheur de l’événement, la gastronomie. Ce sont les fêtes: «das papas, do borrego, da cereja, do caracol, do maranho»… Des musées à thème culinaire voient également leur apparition: le Musée du Fromage de Peraboa, le Musée du Pain de Seia… Parallèlement, de nouvelles formes d’évoquer le passé, naissent. Ce sont par exemple les fêtes médiévales de Belmonte et de Celorico da Beira. Le Portugais aime la fête et aime partager les bons moments de la vie. Témoignant cela, est le fait que 11% du salaire est dépensé dans les restaurants et cafés. Le Portugal a trois fois plus de restaurants que la moyenne européenne. Il arrive parfois que cela soit une rue qui est mise à l’honneur, à l’exemple de la Rua da Cale, à Fundão, pendant la première quinzaine d’août. On y mange, on y boit, on y danse, on y met en évidence les richesses régionales et des artistes de toutte nature s’y produisent. On essaye également de mettre de plus en plus en évidence les particularités des cultures minoritaires. Citons ici le Musée et les Fêtes judaïques de Belmonte. Des circuits se mettent en place pour visiter des villages selon un thème: les villages du schiste, les villages médiévaux, les plus beaux villages (Monsanto, Idanha à Velha, Sortelha, Trancoso, Linhares…). Nous citons ici des exemples d’une région bien précise du Portugal, la Beira Baixa. Mais, rassurez-vous, nous retrouvons les mêmes exemples du Nord au Sud du Portugal. Il y a des villages qui revivent… il y a des villages qui se meurent. L’arrivée des éoliennes dans le Portugal de l’intérieur est venu désenclaver des villages, en créant des routes, chemins… Cela est arrivé trop tard, la plupart des habitants sont partis, il n’y a plus d’écoles, plus de naissances… il y a des villages fantômes, et d’autres qui vont le devenir. Dans certains villages, heureusement qu’il y a encore le café. C’est là que jeunes et moins jeunes, femmes et hommes se rencontrent pour discuter, pour faire la fête après une année de labeur à l’étranger ou à la ville. On reste toutefois de moins en moins de temps au village quand on vient de l’étranger. Les enfants ne viennent plus, comme les parents, pour passer toutes les vacances à travailleur. Après une semaine au village, ils partent au bord de mer, même si de plus en plus de plages fluviales de qualité sont aménagées un peu partout pour retenir les touristes locaux, émigrés et enfants. La fête s’internationalise. Les festivals sont de plus en plus nombreux et quelques-uns ont une renommée mondiale, par la qualité de leurs programmes. Citons par exemple, le Festival in Rio, Boom festival à Idanha à Nova, Festival du Sudoeste à Zambujeira do Mar, Festival de Paredes de Coura… Dans ce pays que nous aimons, on peut encore y faire de belles rencontres… A l’exemple de celle que nous avons faite à Ladeira, un de ces derniers étés. Petit village loin de tout, lors d’une de nos errances pédestres, arrivés au village, nous avons demandé de l’eau… on nous a servi «Jeropiga», boisson qui ressemble au Porto et qui est faite de façon artisanale. Ce sont des gens qui n’ont «rien» selon la conception matérialiste de la civilisation actuelle, pas d’ordinateur, pas de super marchés, pas de voiture… mais qui donnent tout ce qu’ils ont. Nous sommes toutefois là, à la fin probable d’un cycle. De telles rencontres vont devenir de plus en plus rares. L’émigration, l’éclatement des familles, ont conduit à ce que de plus en plus de maisons de repos soient créées. Beaucoup de villageois âgés sont nés dans leurs maisons, mais meurent de moins en moins chez eux. C’est un signe des temps, certaines mœurs se perdent, ainsi qu’une certaine fierté. Tout n’est pas négatif dans notre exemple précèdent. Les maisons de retraite permettant d’une certaine façon de rompre l’isolement auquel bien des grands-parents étaient vouées. Le Portugal, n’en doutons pas, est un beau pays, c’est notre pays et par conséquent, c’est le plus beau pays du monde… Ce bout de l’Europe, qui n’a pas d’ennemis reconnus est planté au bord de la mer, l’obligeant à s’ouvrir, à conquérir, à se dépasser… Il est plein de contrastes et de contradictions. La première génération de Portugais est venue en France laissant leurs racines au pays. La deuxième génération c’est comme qu’un peu éloigné de la terre natale de leurs parents… et chose étonnante, la troisième génération, la jeunesse, se rapproche du Portugal, cherchant ses racines familiales et pas seulement: ils se disent de Benfica, de Porto,… et se rendent malades quand le Portugal perd un match de football. Le Portugal est en train de devenir, pour de nombreux français, la destination privilégiée pour une belle «retraite dorée». C’est le climat, la proximité, son calme, l’accueil de son peuple et parfois l’attrait fiscal qui fait déplacer et installer au Portugal des milliers de Français, faisant rentrer dans l’économie portugaise 2 milliards d’euros. Ils pourront également profiter du plus important réseau autoroutier d’Europe par rapport au nombre d’habitants. Le Portugal a traversé d’énormes problèmes économiques. Ils sont encore là pour une bonne partie, toutefois le Portugal, les Portugais, semblent être toujours en fête. Voilà, sans doute, un des aspects qui font venir au Portugal autant de touristes. Nombreux finissant pour choisir le Portugal comme pays de résidence. Les vacances d’été sont là et la pérégrination annuelle au Portugal commence. Un retour aux racines avec l’espoir d’y rencontrer familles, en perpétuant la tradition ou en adhérant aux nouvelles formes de faire et de faire vivre la fête. Ayant une pensée pour ceux qui malheureusement pour des raisons économiques, mais aussi pour des raisons de santé, restent par ici.