Home Comunidade Quatre jeunes portugais âgés de 17 à 19 ans massacrés dans le maquis des Ardennes le 13 juin 1944António Marrucho·16 Agosto, 2025Comunidade C’est dans les alentours de Revin que 5 portugais furent massacrés, 4 par pendant la mission de Résistance «Citronelle» et un cinquième lors d’une autre opération. C’est ici que probablement le plus de portugais perdirent la vie au même temps pendant la deuxième guerre : Bernardino Carvalho, Louis Preda da Silva, Alphonso Inofe Pereira et Joseph Pereira. Le massacre a eu lieu dans le maquis des Manises sur le plateau boisé du Malgré-Tout, au-dessus de Revin (Ardennes). Le contexte historique : Au cours de la II Guerre mondiale, une mission de Résistance baptisée «Citronnelle» fut organisée au printemps 1943 par le BCRA (Bureau Central de Renseignements et d’Action) et l’État-major interallié. L’objectif était de constituer un maquis dans les Ardennes pour désorganiser les arrières allemands en prévision du débarquement allié. L’organisation du maquis : Deux parachutages d’officiers résistants eurent lieu : les 11 et 12 avril 1944, à Saint-Souplet (Marne) et les 5 et 6 juin 1944, aux Vieux Moulins de Thilay. Le signal d’activation de la mission fut donné par un message codé de la BBC le 5 juin 1944 : «La sirène a les cheveux longs décolorés». Ce message appelait les Résistants du groupe Artois et de la région minière à rejoindre le maquis des Ardennes. Environ 200 jeunes de Revin et des environs répondirent à l’appel. Le massacre du 13 juin 1944 : Trahis par un infiltré, les maquisards furent encerclés par près de 3.000 soldats allemands. Les jeunes résistants, souvent mal armés et inexpérimentés, furent capturés sur le plateau boisé du Malgré-Tout, au-dessus de Revin. 106 maquisards furent torturés et exécutés sommairement, la plupart d’une balle dans la nuque. Leurs corps sont jetés dans une fosse commune, découverte le 19 juin. Malgré une demande d’exhumation, les corps furent déplacés en deux charniers près de Linchamps par les Allemands, avant d’être identifiés et inhumés dignement après la Libération, le 8 octobre 1945, au cimetière de Revin. Des Portugais parmi les victimes : Cinq Résistants portugais perdirent la vie dans cette tragédie, dont quatre lors de la mission «Citronelle» – Bernardino Carvalho, Louis Preda da Silva, Alphonso Inofe Pereira et Joseph Pereira – et un lors d’une autre opération. Il s’agit probablement du plus lourd tribut payé par la Communauté portugaise pendant la II Guerre mondiale en France. Le contexte migratoire : Dès les années 1920, de nombreux immigrés portugais s’étaient installés à Revin pour travailler dans les usines et combler le manque de main-d’œuvre causé par les pertes humaines de la I Guerre mondiale. C’est dans la seconde génération de ces familles portugaises que plusieurs jeunes s’engagèrent dans la Résistance. Mémoire et commémoration : Les noms des victimes sont inscrits sur le monument aux morts des Manises, à Revin et sur le Mémorial de Berthaucourt, à Charleville-Mézières. Les quatre portugais capturés, torturés et fusillés le 13 juin 1944 : Bernardino Carvalho est né le 30 décembre 1925 à Reims, il était un des cinq enfants d’António Francisco Carvalho, né à Bragança le 31 août 1892 et Adelina do Paraiso, née à Paradinho Nova (Bragança), le 17 janvier 1893. Bernardino Carvalho avait une sœur également née à Reims en 1924, Henriette. Volontaire au maquis des Ardennes, capturé, il sera jugé sommairement et fusillé le 13 juin 1944. Sur son acte de décès le 17 juillet 1945 sera ajouté «Mort pour la France». Il habitait avec ses parents Cité Biard, à Revin. . Louis Preda da Silva est né le 2 mars 1926 à Monsempron-Libos (Lot-et-Garonne). Il était fils d’Albano Pereira da Silva, né à Águas Santas (Maia) en 1899 et d’Adelina Ribeiro, née aussi à Águas Santas (Maia) le 24 août 1899. Cette dernière décédera le 1er octobre 1954 dans le quartier d’Orzy, à Revin. Les parents de Louis da Silva sont arrivés juste après la I Guerre mondiale à Monsempron-Libos, le père travaillant en tant que mouleur dans l’usine sidérurgique de Fumel. Louis Preda da Silva était le 5ème et fils cadet des enfants du couple, tous nés à Monsempron. La première des sœurs, Maria, est née en 1921, Joaquim en 1922, Manuel en 1923, António en 1924 et Louis en 1926. La famille Silva fait partie des 16 portugais habitant le village en 1926. Ils sont déjà recensés dans le village en 1921. Au recensement de 1936, ils avaient changé de région, ils habitaient rue Jean Jacques Rousseau, à Revin. Au moment de la capture par les Allemands, la famille habitait à la Cité Porcher de la ville. Est-ce une incompréhension de la part de l’agent de l’état civil qui a fait que Louis ait été enregistré en tant que Louise, de sexe féminin, à la naissance ? Un jugement, bien plus tardif, datant du 18 juin 1944, rectifie l’acte, passant de Louise à Louis et de sexe féminin à masculin. Louis da Silva était bûcheron, engagé volontaire, il a subi le même sort que ses camarades, dans le maquis des Ardennes, capturé, il sera exécuté le 13 juin 1944. Médaillé à titre posthume le 17 décembre 1968, il est déclaré «Mort pour la France». . Alphonso Inofre Pereira est né le 1er juin 1925, à Revin. Il était fils de Mário Augusto Pereira, né le 10 mars 1894 à Parada (Bragança) et d’Adélia Cândida, née le 16 mars 1893 dans le même village que son mari. Il travaillait en tant qu’ouvrier à Revin et habitait Cité Biard. Engagé volontaire au maquis des Ardennes, il sera exécuté par les Allemands le 13 juin 1944. . Joseph Pereira est né le 6 mars 1927, à Revin. Il était frère d’Alphonso Inofe Pereira. Engagé volontaire au maquis des Ardennes, capturé le même jour que son frère, il sera fusillé aussi le 13 juin 1944. . Le Mémorial de Berthaucourt Surmonté d’une croix de Lorraine, après la guerre, un Mémorial fut érigé à Berthaucourt à Charleville-Mézières, pour honorer les martyrs de la Résistance ardennaise. Inauguré en 1946, il sera complété en 1954 par deux murs du souvenir portant 506 noms de la Résistance ardennais. Ce monument accueille aussi des restes de Résistants et des cendres de déportés. Ce sobre monument, qui domine l’agglomération de Charleville-Mézières, a été réalisé à l’endroit même où furent fusillés tant de Résistants ardennais. Des parcelles de terre prélevées dans tous les hauts-lieux de la Résistance ardennaise, mais aussi des cendres et des ossements recueillis dans les camps de concentration furent déposés dans un cénotaphe au pied du mémorial. Ainsi, le Mémorial recevait sa consécration définitive de symbole de la Résistance et de ses sacrifices. Les noms de Bernardino Carvalho, Louis da Silva, Alphonso et Joseph Pereira y sont gravés, tous reconnus «Morts pour la France». Ils étaient tous bien jeunes au moment d’être tués : Bernardino avait 19 ans, Louis 18 ans, Alphonso 19 ans et Joseph, à peine 17 ans. Cette page sombre de l’histoire de Revin rappelle non seulement l’horreur de l’Occupation et la brutalité des représailles nazies, mais aussi l’héroïsme d’une jeunesse, parfois issue de l’immigration, prête à mourir pour la liberté. Honorer leur mémoire, c’est préserver les valeurs de courage, de résistance, et d’unité face à la barbarie.