LusoJornal | António Marrucho

Opinion : Espoir, désespoir, incertitude ou incertitude, désespoir, espoir ?

Les moyens aériens se suivent, ils sont quatre. Ils larguent et aussi vite ils repartent. Un peu d’espoir dans, parfois, le désespoir.

Des feux continuent, ils défient les sommets, le sommet du Portugal. Les deux tours de 9 mètres ne se voient pas malgré qu’elles soient à 1.993 mètres de hauteur, la fumée rétrécit l’horizon.

Les habitants sont confinés près de la plage fluviale, l’eau protège du feu attisé par le vent. Ce sont, tous les trois, des éléments naturels, prétexte de, au voyage, aux voyages, qui peuvent autant être protecteurs que dévastateurs selon la saison, l’action humaine, la dérégularisassion de la nature.

Quarante-cinq Mesures gouvernementales ont été annoncées pour lutter, pour venir en aide…

Nous avons repris la route, cette fois-ci du village vers la ville. La destruction est là, nous roulons entre des terrains encore fumants et des squelettes de pins et eucalyptus, dont la senteur n’est pas celle d’arbres en bonne santé.

De sol fumant, on nous dit que ce n’est plus dangereux… il est vrai que les herbes sèches ont fait place aux cendres.

Les plaques «Terrain à vendre» étaient là depuis bien longtemps… vendre avant que cela arrive…? Plaque et espoir consommés par le feu.

Des techniciens s’activent pour remplacer des fils électriques ou les repositionner, car trainant par terre.

Image étonnante : la base d’un poteau en bois est totalement brûlée, il ne s’enfonce, ne touche plus par terre. Un poteau qui ne tient plus le fil, mais le fil qui tient le poteau ! L’électricité ou le son passe-t-il ? Circule-t-il ?

L’homme, la femme interviewée : «J’ai tout perdu, mais je suis là», des hommes et des femmes démontrant un courage que nous admirons sans bornes. Fatalistes inconsciemment : «si ce n’était pas maintenant, ça serait dans un an ou deux» et pourtant la veille, l’avant-veille ils continuaient à construire… La nature humaine ?

Le désespoir fait parfois place à l’espoir.

Au détour de la route que nous empruntons pour rejoindre la ville, sur un chemin qui conduit aux éoliennes, nos yeux croisent ceux de trois jeunes biches… tout n’est pas mort. Quelques-uns diront, peut-être pas encore. C’est tout de même, pour nous, plutôt un signe d’espoir.

Un autre cas : ce matin alors que nous marchions de l’autre côté du ruisseau, un chemin qui peut se parcourir en quelques minutes, mais là, cela nous a pris une demi-heure, le genou droit dialoguant avec le pied gauche et vice-versa «tiens bon… ne glisse pas, n’aggrave pas», avant la pente à 15% descendant moins vite que nous la montions, il y a de ça quelques années, un serpent traverse.

Nous avons une phobie des serpents, de ce qui est le plus symbolique au monde et ce dans toutes les civilisations et de tous temps… Pour une fois, la phobie est devenue signe d’espoir : «Ah ! Te voilà, tu as résisté ?»

Désespoir-espoir.

En écrivant ces quelques paragraphes à l’extérieur, nous sommes alertés, le stylo fait une pause, nous regardons vers la maison d’en face, une quinzaine d’hirondelles qui dessinent, qui dansent, l’une d’elles bâti un nid à la confluence de la pointe en V renversée du toit… étonnant pour un été déjà bien entamé. Signe d’espoir.

La nuit tombée, nous reprenons l’écriture, nos réflexions… et oh ! merveille, les étoiles sont là, la fumée a laissé place à un horizon à l’infini. Nous distinguons l’étoile du Nord, toujours au même endroit, symbole de nos certitudes ? La lune est toujours là aussi, toutefois changeante, symbole de nos incertitudes ?

Bienheureux ceux qui vivent de certitudes. Est-ce possible de ne pas douter ? Où n’est-il pas mieux de voir le verre à moitié plein qu’à moitié vide ?

Un village pas très loin, avec 7 habitants il y a 3 ans, n’en a plus que deux. On ne peut dater son origine, aucun livre n’en parle, toutefois, la date de fin, elle, approche.

Où nous dissertons, il y a encore deux, voire trois dizaines d’habitants habituels… le Portugal qui résiste de mourir à l’image du 1/3 de la population du Portugal, 70% de son territoire ? Pour combien de temps avant de partir ailleurs, vers le Portugal qui longe la mer ou le Portugal qui est à l’étranger ?

La fraîcheur nocturne se fait sentir, on est passé d’une journée à une autre. La cloche de l’église a donné l’exemple, j’entends le silence du village.

Ailleurs, la lutte continue contre l’ennemi de cet été : le feu.

Espoir-désespoir, incertitude.