Home Comunidade João Catarino da Silva : un Résistant portugais parmi les 31 fusillés des Glières Blanches (23 juin 1944)António Marrucho·7 Agosto, 2025Comunidade Le 23 juin 1944, la commune de Grignon, près d’Albertville, en Savoie, fut le théâtre de l’un des pires massacres perpétrés dans la région pendant la II Guerre mondiale. 31 Résistants, capturés par la Wehrmacht, furent sommairement exécutés au lieu-dit les Glières-Blanches. Parmi eux figurait João Catarino da Silva, un ouvrier portugais engagé dans la Résistance française. Né le 25 décembre 1916 à Nisa, au Portugal, João Catarino da Silva était le fils d’Eduardo da Silva Porto et d’Adelina da Graça Cebola, et le petit-fils de José Luís da Silva et Francisca Ferreira. Il quitte son pays natal seul pour venir travailler en France. Il s’installe d’abord à Villard-du-Planay (Savoie), avant de trouver un emploi dans les aciéries d’Ugine, où il rejoint une importante communauté d’ouvriers étrangers. En 1970 on comptait dans les aciéries d’Ugine, des italiens, 145 algériens et 179 portugais. João Catarino da Silva s’engage dans les Francs-Tireurs et Partisans (FTPF) de Savoie à partir du 8 mars 1944. Son parcours le lie étroitement à celui de ses camarades de travail uginois, comme Robert Darnet ou Casimir Wrona, ce dernier commandant la compagnie FTP 92-01. Très actif, João Catarino da Silva participe notamment à l’attaque d’une patrouille allemande sur la RN6 à Chapelle le 8 mai 1944, et plus tard à l’assaut du poste allemand de Beaufort-sur-Doron, le 21 juin 1944. Mais dès le lendemain, il est capturé dans les alpages d’Arêches, en même temps que 34 autres FTP, lors d’une opération de ratissage menée par plusieurs centaines de soldats allemands, renforcés depuis la Tarentaise, Albertville et la Haute-Savoie. . Le massacre des Glières-Blanches Sur les 35 Résistants faits prisonniers, seuls les plus jeunes – 4 mineurs de moins de 18 ans – seront déportés. Les 31 autres, dont João Catarino da Silva, sont acheminés vers le champ des Glières-Blanches, à Grignon, attachés deux à deux et «jetés pêle-mêle dans des camions comme du matériel», selon les mots du Maire d’Albertville, Joseph Mugnier. À 18h00, le 23 juin 1944, ils sont mitraillés dans le dos par les troupes allemandes. L’inhumanité de cette exécution choque profondément la population locale. Les Allemands, dans un premier temps, veulent enfouir les corps sur place pour empêcher toute identification. Joseph Mugnier réussit, après d’âpres négociations, à obtenir le transfert des dépouilles vers le cimetière communal de la route de Pallud, à Albertville. Il ordonne que les corps soient enveloppés dans des couvertures servant de linceul, pour préserver leur dignité. Grâce aux papiers, objets et effets personnels retrouvés sur les victimes, ainsi qu’au soin méticuleux apporté par les services municipaux, 12 corps seront immédiatement identifiés, dont celui de João Catarino da Silva. Cinq semaines plus tard, une exhumation permet de placer tous les corps dans des cercueils dignes. . Reconnaissance et mémoire João Catarino da Silva est reconnu «Mort pour la France». Dans les archives de la Défense, des témoignages soulignent son engagement dès son arrivée dans la Résistance, sa conduite exemplaire et sa mort «en brave, fusillé par les Allemands». À titre posthume, il est nommé soldat de 2ème classe et décoré de la Croix de Guerre. Contactée au Portugal, sa famille, par l’intermédiaire de son père Eduardo da Silva Porto, entame des démarches pour faire reconnaître officiellement son fils comme Résistant, avec l’aide du Capitaine Paul Bouvier (alias Paul Dionis), commandant de la 1ère Compagnie du 3e Bataillon FTPF. João Catarino da Silva repose aujourd’hui dans la nécropole nationale de La Doua, à Villeurbanne. Son nom est gravé sur le monument à la Résistance d’Albertville, sur la stèle commémorative de Grignon, dédiée aux 31 fusillés, ainsi que sur le monument aux morts des deux guerres à Ugine, où il a travaillé. Son histoire, comme celle de nombreux Résistants étrangers, rappelle que la libération de la France fut l’œuvre de femmes et d’hommes venus de tous horizons, unis par le refus de la barbarie nazie. . Contexte historique Ce massacre survient deux semaines après le débarquement de Normandie. Les forces allemandes, sur ordre, doivent réprimer sans pitié toute activité Résistante. Des opérations de terreur comme celle des Glières-Blanches visent à briser le moral des populations locales et à étouffer les foyers de rébellion. Mais loin d’éteindre l’élan de liberté, ces actes brutaux marquent la mémoire collective et renforcent, aujourd’hui encore, le devoir de transmission et de reconnaissance envers ceux qui ont payé de leur vie leur engagement pour la liberté.