Home Comunidade 103 ans après : la mémoire des premiers soldats portugais inhumés à RichebourgAntónio Marrucho·18 Outubro, 2025Comunidade 18 octobre 1922 – 18 octobre 2025. Il y a 103 ans, les neuf premiers soldats du Corps Expéditionnaire Portugais (CEP), exhumés du cimetière de Merville, étaient inhumés à Richebourg, dans ce qui allait devenir le Cimetière Militaire Portugais de Richebourg – lieu-dit «L’Avoué», lieu de mémoire du sacrifice portugais pendant la I Guerre mondiale. . Les premiers inhumés à Richebourg Le 18 octobre 1922, les dépouilles de neuf soldats portugais sont transférées et inhumées à Richebourg. Ils inaugurent ainsi un cimetière de regroupement destiné à honorer les morts portugais tombés sur le sol français. Voici la liste de ces neuf soldats, accompagnée de la localisation initiale de leurs tombes à leur arrivée à Richebourg, ainsi que leur emplacement définitif : Luís Lopes Almeida Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 1 Définitif : Carré A, ligne 8, tombe 15 António Figueiredo Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 2 Définitif : Carré A, ligne 8, tombe 16 Jeremias Alves Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 3 Définitif : Carré A, ligne 8, tombe 17 António Nunes Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 4 Définitif : Carré A, ligne 8, tombe 18 Joaquim da Silva Sobreira Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 5 Définitif : Carré A, ligne 8, tombe 19 Manuel Martinho Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 6 Définitif : Carré B, ligne 1, tombe 1 José da Silva e Sousa Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 7 Définitif : Carré B, ligne 1, tombe 2 Henrique André Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 8 Définitif : Carré B, ligne 1, tombe 3 Joaquim Lopes Arrivée : Carré 1, ligne A, tombe 9 Définitif : Carré B, ligne 6, tombe 11 . Que deviennent les objets personnels des soldats décédés ? Mais que devenaient les effets personnels des soldats morts au combat ou dans les hôpitaux ? C’est une question que nous n’avons jamais vue abordée dans la littérature portugaise sur la I Guerre mondiale. Grâce au patient travail de recherche de José Carlos Durão, dans les plus de 2.000 boîtes d’archives du CEP conservées à l’Arquivo Histórico Militar, à Lisboa, nous disposons d’éléments de réponse précieux. Dans un compte-rendu daté du 30 décembre 1919, envoyé depuis Vaudricourt, près de Béthune et signé par un certain Vieira, on lit : «Les restes ont été examinés soigneusement, placés dans un sac, les pièces intéressantes ont été photographiées en détail. Après désinfection, le tout a été fermé et scellé pour être remis ultérieurement aux familles». Ces objets, souvent modestes, prenaient une valeur inestimable pour les familles. Pour des mères, des pères, des frères ou des sœurs qui n’auront jamais l’occasion de voir la sépulture de leur fils ou frère tombé en France, le contenu du «espólio» – terme portugais désignant l’héritage ou les biens personnels du défunt – devenait le dernier lien tangible avec l’être cher perdu à jamais. . Procédure de restitution aux familles Le Quartier Général du Territoire (QGT) après avoir récupéré les sacs en provenance de France, établissait une fiche de restitution des objets à la famille. Ce document devait être signé par deux témoins et un proche du soldat. Si ce proche ne savait pas signer, un tiers, parfois un officier, pouvait signer à sa place. Le tout était validé par un cachet officiel de l’administration militaire ou de la Mairie du canton où se trouvait la famille. Voici quelques exemples d’«espólios» documentés parmi ces neuf premiers soldats inhumés à Richebourg : Joaquim Lopes : 2 caleçons, 2 chemises, 3 pulls en laine, une paire de chaussettes, une ceinture… en tout 15 pièces de vêtements, un couteau de poche anglais, une carte postale. Le tout a été restitué à sa mère, Ana Lucinda Carola, qui a signé le document. António Nunes : 18,25 francs en poche, un crayon et deux boutons. Le témoin Sebastião dos Reis Caroço a signé le document de restitution, sa mère Isabel Escaleiro ne sachant pas écrire. Manuel Martinho : une paire de pantalons en coton, une paire de chaussettes, un mouchoir, tous décrits comme n’ayant pas été lavés. Le témoin Joaquim Jorge signe le document, son père, Manuel Martinho, étant illettré. António Figueiredo : un sac en tissu, un couteau de poche, une bague en or. Les objets sont remis par la Mairie de Mangualde à son épouse, Conceição Fernandes. . L’argent retrouvé et la gestion militaire Concernant l’argent retrouvé sur les soldats décédés, celui-ci était récupéré et restitué aux Régiments. Par exemple, le 27 novembre 1918, une somme totale de 293 escudos et 10 centimes fut restituée au Régiment d’Infanterie n°28, provenant des effets de 25 soldats. De même, le 9 avril 1920, soit exactement deux ans après la Bataille de La Lys, le Q.G.T. du CEP restitua 90 escudos et 49 centimes au Régiment d’Infanterie n°21, somme issue des effets personnels de 12 soldats, dont 4 escudos et 87 centimes appartenant à António Nunes. . Mémoire et émotion Tous ces objets – vêtements, pièces, bagues, cartes postales… – témoignent du quotidien de ces hommes et de la violence de leur destin. Leur restitution constituait un acte de mémoire, de reconnaissance et d’humanité. On imagine l’émotion des familles portugaises, recevant parfois des années après la guerre ces modestes biens, dernières traces d’un être aimé tombé loin de chez lui, dans les plaines de Flandre. . Sources : Lire ICI. Arquivo Histórico Militar Livre “João Gaspar, o Guarda do Cemitério Militar Português de Richebourg – L’Avoué”, de Sérgio Durão e José Carlos Durão, edição: dezembro de 2023.