Collection privée Trinel

I Guerre Mondiale, et après? Intégration en France semée d’embuches administratives et humaines

[pro_ad_display_adzone id=”46664″]

Ce récit résulte de la confrontation (pacifique) d’une publication, de recherches personnelles relatives aux mariages mixtes franco-portugais après-guerre, avec le centenaire de la Bataille de La Lys d’avril 2018.

Cette commémoration a donné l’envie à Monsieur Trinel de chercher des informations concernant son grand-père portugais, celui-ci ayant participé à la Grande Guerre dans le Pas-de-Calais. Il m’a contacté via le blog où il a trouvé mention de son aïeul, m’a proposé des renseignements que je ne pouvais trouver par moi-même, et pour cause… Un imbroglio de noms de famille. La suite est heureuse, au regard du titre.

Pour éviter les informations non connues des descendants et par respect de la vie privée, je le nommerai simplement Manoel. En l’absence de dossier militaire, sur le site des Archives historiques militaires portugaises, retraçant son parcours en France, grade, démobilisation, les données viennent de l’Etat civil français et de l’histoire familiale.

Manoel est né en 1893, à Fonte do Feto (selon le livret de famille), Alhos Vedros, au sud de Lisboa. Avant la guerre, il est instituteur au Portugal. Débarqué en France avec le Corps Expéditionnaire Portugais (CEP) en 1917, il s’y installe et garde le contact avec son pays de naissance où il va régulièrement visiter son frère. Il ne choisit pas la possibilité de devenir français malgré la Loi sur la nationalité de 1927 (1), mais reste dans le nord de la France jusqu’à sa mort.

 

Difficultés administratives, liées à l’Etat civil?

Manoel, stationné à Aire-sur-la-Lys (Pas-de-Calais) pendant la I Guerre Mondiale, rencontre sa future épouse native de Richebourg, probablement évacuée de quelques kilomètres à l’arrière. Cette commune, ainsi que celle voisine de Neuve-Chapelle, sont sur le front portugais du Pas-de-Calais. Une fille nait en 1918 de cette union non officialisée. A l’Etat civil, la petite ne porte ni le nom de famille de la mère, ni celui du père portugais, mais un prénom de son père.

Erreur liée à une différence de langue et de compréhension? Aux prénoms du soldat? Il est vrai que Manoel peut être aussi bien nom de famille que prénom. Tout comme en France peut exister une confusion avec les prénoms Antoine, Pascal qui sont également des patronymes. Mais si Manoel est instituteur au Portugal avant la guerre, il fait partie des personnes lettrées, pourquoi cette erreur de nom de famille? Il n’est pas présent à la naissance de l’enfant pour confirmer son identité? Possible…

Mais lorsqu’il se marie 10 ans après la naissance de la fillette, c’est toujours sous ce prénom transformé en nom de famille qu’il le fait et non son vrai patronyme. Je n’ai pas trouvé son acte de décès, mais un courrier en Mairie permettra peut-être de le consulter et d’obtenir le nom sous lequel il est décédé… Le mystère demeure. Une des raisons qui expliquent que dans la recherche d’ancêtres les noms de famille s’écrivent en lettres majuscules.

 

Difficultés humaines intrafamiliales

Après-guerre, Manoel s’installe à Neuve-Chapelle, rue du bois, en tant que menuisier. Il vit toujours maritalement. Mais cette liaison n’est pas acceptée par les deux frères de sa compagne. Des disputes sont fréquentes et l’une d’elle se termine en maison d’arrêt de Béthune (Pas-de-Calais) pour le principal intéressé. En effet, il utilise son arme de guerre portugaise, tire sur l’un des deux frères et se blesse lui-même. Il se constitue prisonnier à la gendarmerie de Laventie, une plainte est déposée.

La suite sera néanmoins heureuse, des vacances au Portugal, des enfants, petits-enfants. Une vie menée à Neuve-Chapelle, où Manoel exerce différents métiers dont celui de «ferrailleur». Le petit-fils raconte les belles vacances passées sur le tas de ferrailles et les tournées dans les villages voisins pour acheter les métaux, les chiffons, les peaux de lapins en criant: «peau de zibo, peau, peau».

Il est enterré au cimetière de Neuve-Chapelle sous ses deux prénoms.

A noter qu’au mariage de 1928, après la nouvelle loi de 1927 (2), l’épouse «tardive» déclare conserver la nationalité française.

 

Sources:

Coupures de presse Gallica Bibliothèque nationale de France, Etat civil Archives départementales du Nord et du Pas-de-Calais, Livret de famille et photos collection privée.

(1) et (2) un prochain écrit concernant la Loi sur la nationalité de 1927?
En attendant: https://memoiredhistoires.com/2018/03/16/mariages-franco-portugais-grande-guerre/

 

[pro_ad_display_adzone id=”37510″]

LusoJornal