L’association Memória Viva rend hommage à Manuel Madeira


Le dimanche 9 février, l’Association Memória Viva – Mémoire Vive rend hommage à l’un de ses membres fondateurs, Manuel Madeira, cinéaste, poète et militant, décédé en décembre 2023.

Rappeler le parcours et l’œuvre de Manuel Madeira c’est évoquer la vie d’un rebelle et d’un pacifiste à la fois, une vie marquée par le refus d’un quotidien ennuyeux et par la révolte permanente face aux idées fixes et face à l’obscurantisme.

Né en 1936 dans la province de l’Alentejo, militant actif contre le fascisme portugais et contre la guerre coloniale, Manuel Madeira est contraint de quitter son pays, à l’âge de 26 ans. En arrivant en France, en 1962, il travaille pendant six mois comme ouvrier aux usines Renault de Boulogne-Billancourt.

Passionné par le Septième Art (au Portugal il animait des ciné-clubs), son intention était de faire des études cinématographiques. Ainsi, après Billancourt, il se hâte d’aller trouver un travail à la Cinémathèque Française, à Paris.

Une rencontre avec Henri Langlois, Directeur de cette institution, lui permet d’y être embauché. Parallèlement, il côtoie de grands noms de la poésie et du cinéma français, avant de partir en Pologne pour fréquenter la célèbre école de cinéma de Lodz.

De retour en France, il enseigne cette discipline à l’IDEC et à l’Université. Puis il réalise plusieurs films documentaires sur l’immigration en France, comme “O presépio português” (1977) ou “Crónica de emigrados” (1979), sélectionné pour le premier festival de cinéma Méditerranéen, sans oublier “O Circo”, un court métrage sélectionné pour le Festival de Cannes dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs.

Cofondateur de l’émission de télévision “Mosaïque”, sur FR3 (1977-1987), Manuel Madeira a été également à l’origine de la création de l’Association Memória Viva et a collaboré dans plusieurs revues et journaux, portugais et français, parmi lesquels la revue Latitudes-Cahiers lusophones (1997-2012).

En 1980, il coordonne et publie, avec Yvette Tessaro, son épouse, et Alberto Melo, “Saudades não pagam dívidas” (littéralement, “les regrets ne paient pas les dettes”), un recueil d’œuvres d’expression émigrée, édité à Paris avec le concours de l’Association l’Œil Étranger, comprenant des poèmes recueillis dans les associations ou auprès de poètes anonymes.

Manuel Madeira a commencé à écrire de la poésie à l’âge de 19 ans. En français il a publié “Les mois chauds” (1973), puis “Perturbations” (2006), où il s’interroge notamment sur son enfance. Dans son dernier recueil de poèmes, écrits en portugais, “Já cá não está quem falou” (“Il n’est plus là celui qui a parlé”), publié en 2012, on trouvera 76 poèmes et une dizaine d’illustrations dont il est lui-même l’auteur.

Le programme de cet hommage sera constitué d’une exposition de photographies rappelant la création de l’Association Memória Viva – Mémoire Vive (2003) ; de la projection d’un court-métrage de Bernard Baissat intiulé “Manuel Madeira, télévision ou cinéma ?” ; d’une présentation par Dominique Stoenesco de la biographie et de l’œuvre poétique de Manuel Madeira ; de lectures de ses poèmes et autres textes, et d’un verre de l’amitié.

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Dimanche 9 février, 15h00

Association Memória Viva

Local EDMP

8 impasse Crozatier

75012 Paris

M° Reuilly-Diderot

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Mon Cheval

(poème de Manuel Madeira, extrait du livre “Perturbations”)

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Mon cheval, mon beau cheval,

mon cheval en bois,

qui ne mange pas, qui ne boit pas,

mon cheval en bois.

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Que fais-tu dans ton étable

quand je ne suis pas là ?

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Mon cheval, mon beau cheval,

qui n’a jamais galopé que dans

mon cœur opalin d’enfant lunaire.

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Mon cheval, mon solide cheval de fer.

Mon beau cheval, dissimulé au fond

de sa vieille étable pour ne pas

se rendre à la guerre.

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Mon cheval ailé, galopant dans

les astres. Mes astres vides !

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Je n’ai pas de royaume,

je n’ai pas de ciel,

je n’ai pas de patrie.

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Je ne suis pas un chevalier,

je ne lève pas mon épée pour

l’abattre sur quiconque.

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Je n’ai que le cheval en bois

de mon enfance gardé au fond

de l’étable.

La nuit, il se précipite

d’un élan absolu sur les routes

de mon passé, chevauché par tous

mes souvenirs, il galope jusqu’à

l’arrivée du nouveau jour.

Mon cheval, mon cheval éthéré.