LusoJornal / António Marrucho

Opinion: Et après? Réflexion subjective sur une belle victoire

On a gagné, on a gagné, on a gagné… phrase la plus prononcée depuis quelques heures dans l’hexagone. Nous y reviendrons.

Dans notre chronique de LusoJornal du 8 juin dernier, qui avait pour titre «Le sport, opium de l’homme ou moteur économique d’une nation», notre conclusion était: «À quelques jours du coup s’envoi, souhaitons que celui-ci soit une réussite sportive et humaine, que les 32 pays qualifiés fassent de leur mieux et que les 64 matchs qui vont s’y réaliser dans les 12 stades, dont 9 tous neufs, soient plaisants et pacifiques, à l’image du monde que nous souhaiterions. Si cela était le cas, nous dirions que le budget de 10 milliards d’euros de la compétition aura bien été utilisé».

Maintenant que le Championnat du monde de Football en Russie est terminé, nous nous félicitons. Presque tous nos souhaits ont été réalisés. Presque… j’allais oublier l’élimination du Portugal en huitième de finale! Si, si… trop tard…

Des stades pleins, pas de gestes déplacés de la part de spectateurs, pas de drames, arbitrage vidéo efficace.

Le ksar Poutine et les siens ont su organiser un très beau Championnat du monde, le plus beau selon le Président de la FIFA. Ils y ont mis sûrement beaucoup de sécurité. Impressionnant était le nombre de stadiers à chaque match, ils étaient distants les uns des autres d’à peine 2 mètres, voire en finale d’un petit mètre.

Le football est probablement le sport le plus pratiqué et le plus universel, présent un peu partout, contrairement à d’autres, qui sont plus pratiqués dans certains pays, certains continents où ils attirent également des foules: le base-ball, le basket-ball, le football américain, par exemple.

Le football est source de dérives, toutefois en ce moment festif, nous dirons qu’aucun événement au monde n’est aussi fédérateur, les moyens de communication actuels aidant, évidemment.

Le football met en évidence le sentiment d’appartenance… appartenance à une nation. Il réunit des gens de toutes classes, de toutes origines, qu’ils soient de gauche ou de droite… le football transcende.

Combien de repas, de réunions familiales, de fêtes, n’ont pas eu lieu depuis un mois – parfois dans des lieux les plus improbables – sous prétexte de partage, en regardant le match de football de l’équipe de son pays.

Ce dimanche matin du 15 juillet ensoleillé, lors de notre marche, nous avons eu l’impression que la France s’est réveillée plus tard. Est-ce la nuit du 14 juillet qui a été longue ou est-ce la prévision, le désir d’une journée du 15 juillet solsticiale? Autres impressions: même la nature semblait s’être apprêtée de ses plus belles couleurs. Jamais pendant nos errances matinales nous n’avions reçu et donné autant de sourire autant de bonjour… Allez savoir pourquoi!

Le football, lors d’un Championnat d’Europe, d’un Championnat du Monde, permet, de découvrir, d’échanger avec son voisin qu’on ignorait depuis des années. Combien de familles ne se sont pas retrouvées, alors qu’elles ne se voyaient pas depuis… Combien peut-être aussi des reconsolidations ne se sont pas faites par le biais du football?

Que dire du rôle d’un Ronaldo pour le Portugal et de la folie qu’il est en train de déclencher à Turin? À 145 euros, les maillots du Madeirense s’arrachent. La demande est plus forte que l’offre. Qui a dit que le transfert de CR7 a été trop cher?

Dans tout négoce, l’important n’est-il pas la notion de l’offre et de la demande? En une semaine 50% du prix du transfert a été amorti par la vente de maillots.

La France a commencé tout doucement sa phase finale du Championnat du Monde de football, les matchs de poule n’ont pas été brillants. La France et les Français en demandaient plus. Le doute sur la qualité de son football a été levé dès le huitième de finale, et là… on voit les drapeaux qui sortent aux fenêtres, qui s’exposent, le bleu blanc rouge devient habit, on se colore de bleu, blanc, rouge. Même nos femmes les moins sportives, se mettent à apprécier le football… à la longue elles apprennent qu’un coup de coin c’est la même chose qu’un corner…

La confiance est là, la confiance renaît. Il n’y a comme que, le sentiment qu’une belle étoile est au-dessus de l’équipe de France et que l’exploit est à leur portée, rien ne peut lui arriver.

Le 14 juillet 2018 fut festif, on a eu l’impression même qu’il a été encore plus que d’habitude. Question de pétards qui ont éclaté bien avant la Fête nationale? Non, pas seulement cela. Il y avait l’espoir d’un lendemain avec une fête encore plus importante… une fête rare. On n’est pas Champion du Monde tous les ans.

On est les Champions… on est les Champions… on est, on est, on est les Champions… sonnera pour longtemps dans nos oreilles. La fête fut longue, la fête sera longue. En France, à l’heure où d’habitude on se lève, beaucoup ne s’étaient pas encore couchés. Remarquez… la boisson à base de houblon a tout de même entre 90 à 97% d’eau…

Macron est arrivé à la tête de la France… on ne l’a presque pas vu arriver, tellement tout s’est si vite passé pour lui.

Deschamps, on l’a vu arriver. D’un des plus titrés des joueurs français, il est devenu un entraîneur performant. Il a prouvé être un véritable meneur d’hommes et le succès est venu avec: il a remporté en tant qu’entraîneur, des trophées: la série A à la Juventus de Turin, à l’AS Monaco et à l’Olympique de Marseille.

L’équipe de France, qu’il a pris en main depuis 2012 a approché le Graal à plusieurs reprises. Il a été privé de celui-ci en finale du Championnat d’Europe de football il y a deux ans, par le Portugal…

Mais cette fois-ci, c’est fait. C’est historique. Cela restera historique, d’autant plus, avec une équipe jeune, promise à un bel avenir. Des 23 joueurs choisis pour le Mondial, 14 n’ont pas participé au Championnat d’Europe de football il y a deux ans!

On est les Champions… on est les Champions… on est, on est, on est les Champions… 65.585.857, ou presque, de personnes, sont des Champions, sans compter ceux vivant à l’étranger. Une question de forme: un ballon rond, qui satisfait des habitants aux six coins de l’hexagone et aux quatre coins du Monde. Sur 672.052 km2 on n’aura jamais entendu autant de classons. Un tohu-bohu constructif à l’opposé de celui de Gaza et de la Syrie, qui enterre beaux sentiments et êtres humains.

Deschamps, un découvreur de talents, a pris des risques de getter dans la gueule d’une telle compétion des nouveaux joueurs qui ont bien su éviter d’être dévorés par l’enjeu. En prime, leur valeur marchande, pour quelques uns, se multipliant en un an, par 25! À l’exemple de «Jeff Tuch», Benjamin Pavard. De spectateur dans la fan zone à Lille Europe en 2016, il est passé à acteur-révélation d’un film bien mis en scène par Deschamps.

En 1998, la France a organisé le Championnat du Monde de Football. Elle l’a gagné. Alors que le PIB a progressé de 2,3% en 1997, en 1998 la progression a été de 3,5%. Qu’en sera-t-il en 2018, voire 2019? N’en doutons pas, le Championnat du Monde de football contribuera à une amélioration du PIB de la France. De combien? La parole à plus spécialiste que nous. Philippe Waeschter, Emmanuel Lechypre où pourquoi pas François Lenglet en parleront mieux que nous.

D’ores et déjà, les vendeurs de pizzas, les baraques à frites, les vendeurs de blondes, brunes, les magasins de sport, les fabricants de drapeaux, tels que l’entreprise doublet à Avelin, dans le Nord, disent merci. Merci Deschamps, merci Mbappé, meilleur jeune de la compétition, et compagnie. Les marchands de pétards et les pétards eux-mêmes en ce mois de juillet 2018 ont été de la fête encore plus que d’habitude.

Faire la fête, n’est-ce pas une manière de conjurer d’une certaine façon son sort et celui du pays? Le souvenir de Nice et de son 14 juillet 2016 est encore bien vif dans nos mémoires.

C’est un polyèdre appelé aussi icosaèdre tronqué de 32 faces, le même nombre que les pays qui ont participé à la phase finale de la compétition, d’un diamètre de 22 centimètres et qui pèse entre 400 et 450 grammes. Ce polyèdre a pour but de rentrer dans un rectangle de 7,32 mètres de largeur et 2,44 mètres de hauteur.

De quoi parle-t-on? Pauleta, dans le film «La cage dorée», à la fin du film, le libère avec un magistral coup de pied, l’envoyant dans le fleuve Douro.

Tout cela pour gagner un objet de 37 centimètres de hauteur, pour 6 petits kilos d’or.

Vous l’aurez deviné, c’est un simple ballon qui doit rentrer dans un but, appelé parfois de «cage». Si le ballon rentre dans le rectangle, c’est la folie. S’il passe à côté, c’est la tristesse, et là le PIB… et pourtant parfois ce n’est qu’une question de centimètres, voire de millimètres…

Qu’il a été bon ce joueur, qu’il a été nul… et pourtant, un jugement pour une question de quelques millimètres!

La France a mérité la victoire, surtout pour son football de la deuxième mi-temps de sa finale. Finale bien arrosée. Joueurs et même le Président Macron ont mouillé le maillot.

Le Monde a vibré. Ainsi va le Monde. La France goutte au plaisir de la victoire. Elle a été belle le 10 juillet 2016 pour le Portugal, elle a été belle ce 15 juillet 2018 pour la France. Elle sera belle pour l’éternité.

Gouttons, acceptons l’insouciance du jour, des prochains jours. Les tracas de la vie? On aura tout le temps d’y penser après-demain… Une victoire qui en appellera d’autres?

L’équipe de France de football féminin, participera l’année prochaine dans l’hexagone au Championnat du Monde. Imitera-t-elle son homologue masculine?

On peut retirer des leçons d’une défaite. On peut retirer des leçons d’une victoire. Le football, en espace d’un mois, aura sublimé la belle invention française: Liberté, Égalité, Fraternité. Didier Deschamps, à la veille de la compétition, en conférence de presse, ayant été avec sa formule: sérénité, concentration et confiance.

Le sport aplani les différences, le sport démocratise l’effort. Qu’on soit un grand scientifique, médecin, agriculteur… au moment, par exemple d’un marathon, tout le monde est dans la même «galère».

La victoire de la France, les victoires de nos vies, sont belles. N’oublions toutefois pas que l’équipe qui a perdu, nos défaites personnelles, ont engendré autant d’efforts que celui qui a gagné, voire plus. Bravo a eux aussi. La victoire peut être solitaire, mais aussi mise en valeur en fonction de l’adversaire et des adversités du moment, de nos difficultés…

Bravo à la France!