Susana Alexandre

Gérald Bloncourt : derrière son objectif, la dignité des immigrés portugais

Le documentaire “Gérald Bloncourt, le franc-tireur de l’image”, réalisé par Silvia Voser, a été projeté le 8 avril dernier à l’Auditorium de l’Hôtel de Ville de Paris, en présence d’Isabelle Bloncourt, veuve du photographe. Une manière de rendre hommage au photographe.

Ce film retrace avec justesse le parcours du photojournaliste, laissant une large place à ses propres mots. Bloncourt y partage ses souvenirs, ses anecdotes, ses émotions, qu’il évoque notamment à travers les photos prises lors de manifestations, dans les usines ou dans les mines.

Un documentaire touchant, rempli d’histoires humaines qu’il jugeait essentiel de transmettre.

Une version DVD devrait prochainement voir le jour, pour continuer de faire vivre son engagement et son regard unique.

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Une attache envers le peuple portugais

Dans les rues boueuses des bidonvilles de Champigny-sur-Marne, au cœur des années 60, un homme se fraye un chemin, appareil photo en main. Ce regard, c’est celui de Gérald Bloncourt, photographe, militant, exilé lui-même, qui a choisi de faire de son art une arme pacifique pour donner une voix à ceux que la société préfère ignorer.

«Mon appareil photo, c’était mon arme pour me battre», aimait-il dire. Un combat sans violence, mais guidé par une volonté inébranlable : montrer l’invisible, témoigner de la vie des exclus et rendre la dignité aux oubliés.

Fuyant la dictature de Salazar et la pauvreté, des milliers de Portugais quittent leur pays avec l’espoir d’un avenir meilleur en France. Mais à leur arrivée, c’est une autre réalité qui les attend : cabanes, conditions de vie précaires, invisibilité. Bloncourt, lui, a refusé de détourner le regard. Il s’est approché au plus près, il a pris le temps d’écouter et surtout, de photographier, sans mise en scène et sans filtre.

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Une mémoire photographique engagée

Ses clichés racontent une histoire que peu de médias ont choisi de montrer à l’époque. Derrière chaque image, des sourires volés à la fatigue, des enfants pieds nus dans la boue, des gestes de solidarité discrets mais puissants. Bloncourt n’a pas seulement capturé des scènes de vie : il a figé des fragments d’humanité, inscrivant la dignité de ces travailleurs exilés dans la mémoire collective. Une manière de raconter leur histoire et qu’il puisse la transmettre à leur tour. Car pour beaucoup, ils préféraient cacher les conditions de vie qu’ils avaient en France et avec ces photos, ils ont pu expliquer leur propre histoire.

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Une exposition en plein cœur de Paris

Aujourd’hui, ses photographies s’exposent jusqu’au 30 avril 2025 sur les grilles du square de la Tour Saint-Jacques, rue de Rivoli, à Paris. Une exposition en plein air, ouverte à tous, qui invite les passants à croiser ces regards d’exilés, à s’arrêter, et à ne pas oublier ces vies discrètes mais essentielles à l’histoire de France.