Mémoire des Hommes

En France, en 1917, dans la Légion étrangère, un soldat portugais est retrouvé dans le Fonds de Moscou

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,Le «fonds de Moscou» est un ensemble d’archives françaises saisies et passées dans les mains allemandes en 1940, puis russes en 1945. Restituées à la France à partir de 1994, il contient des informations concernant des étrangers qui ont eu besoin de titres de séjours, ont demandé une naturalisation, etc… Des déserteurs sont «fichés» dans ce fonds, d’où l’écriture de ce sujet.

 

Des éléments du bulletin militaire du soldat portugais

José de Brito da Mana est né le 12 octobre 1885 à Loulé, Faro, Portugal. Il est fils de Joaquim et Marie Leal (?) domiciliés en Algarve. Lors de son recrutement pour le 1er Régiment étranger à Bayonne, Basses-Pyrénées, France, il est dit marin y domicilié en 1916. Les recensements de population sont à consulter pour connaître son lieu de résidence en 1911 et 1921 (France ou Portugal?).

Engagé volontaire dans la Légion étrangère le 26 octobre 1916, il est arrivé le 28 octobre au 1er Régiment étranger. Il manque à l’appel le 12 mars 1917 et est déclaré Déserteur le 17 mars. Il est rayé des contrôles le 1er janvier 1918 et des contrôles de désertion le 24 octobre 1922, amnistié.

 

Des courriers échangés avec une «femme portugaise engagée» (*)

Des documents proposés par les Archives municipales de Ponte de Lima permettent de trouver la présence de José de Brito da Mana en France, de décembre 1916 à février 1917, pendant sa période de campagne contre l’Allemagne.

Il est retrouvé au camp militaire de La Valbonne dans le département de l’Ain. Ce camp servait pour l’instruction des troupes (manœuvres, tir…), pour le transit des soldats avant le départ vers l’armée d’Orient (une raison de la désertion?).

Les journaux de marche et opérations écrivent que le 1er Régiment étranger, fin 1916 début 1917, était présent au Maroc (une autre raison de la désertion?)

Plusieurs documents des Archives sont analysés. Il s’agit de courriers échangés entre le soldat et Ester Norton de Matos (épouse du Ministre de la guerre). Elle faisait partie pendant le I conflit mondial des femmes portugaises engagées, Présidente de la Commission d’assistance aux soldats portugais en campagne (Cruzada das Mulheres Portuguesas).

Dans une première lettre du 25 décembre 1916, José de Brito da Mana renouvelle avec tristesse une correspondance restée sans réponse et présente ses vœux. Ester Norton de Matos lui répond le 4 janvier suivant.

Dans une lettre du 10 janvier 1917, le soldat portugais de la Légion étrangère sollicite des vêtements pour se protéger de la neige et du froid ressenti en France (une autre raison de la désertion?)

Le 27 janvier 1917, l’épouse du Ministre de la guerre répond au soldat. Elle l’avise qu’elle a contacté la Présidente de la Croix-Rouge portugaise pour qu’il lui soit envoyé pulls, sous-vêtements, chaussettes en laine, gants, écharpe et mouchoirs.

Le 5 février 1917, La Croix-Rouge envoie une réponse à Ester Norton de Matos pour confirmer l’envoi des vêtements au demandeur légionnaire en France. Celui-ci accuse réception des vêtements offerts le 27 février 1917 et remercie vivement ces «dames engagées». Deux mois se sont écoulés entre les premier et dernier courriers.

Cet échange entre un soldat portugais et la «Cruzada das Mulheres Portuguesas» n’est pas un cas isolé aux Archives.

 

Le Fonds de Moscou

Un dénommé José Brito da Mana est retrouvé dans le fonds de Moscou, le fichier central de la Sûreté nationale du Ministère de l’Intérieur (aujourd’hui Police nationale). Un dossier le concernant pour les années 1917-1919 est consultable aux Archives nationales françaises et peut donner des éléments concernant la désertion du soldat.

Le “fonds de Moscou” est un ensemble d’archives françaises saisies par les occupants allemands lors de leur arrivée à Paris en 1940. Ces archives passèrent aux mains de l’Armée Rouge après la capitulation du régime nazi. Elles ont été conservées plus de 50 ans aux Archives spéciales de l’URSS à Moscou. Des répertoires ont été établis par les archivistes russes. La chute du bloc soviétique a permis leur restitution à la France entre 1994 et 2001.

Ont été fichés des communistes, des anarchistes, des antimilitaristes, des étrangers: des interdits de séjour, des expulsés de leurs pays, des demandes de passeports de Français à l’étranger ou d’étrangers en France, des demandes de carte d’identité, des demandes de naturalisation, etc…

La désertion entre comme motif dans ce «fichage». Le fonds donne un aperçu d’une partie de la population de 1900 à 1940, parfois est proposé une simple fiche (une photo est jointe), parfois un dossier complet à consulter en salle de lecture des Archives nationales.

A ce jour, les traces du dénommé José de Brito da Mana sont trouvées à Bayonne et dans l’Ain. Avis à la famille, si elle veut en dire plus!

Au service de l’Armée portugaise en France, dans les Flandres, ou au service de la Légion étrangère dans l’Armée française, les soldats portugais ont souffert du froid.

 

(*) Des femmes portugaises dites féministes se sont engagées, pendant la I Guerre mondiale, pour assister les soldats de leur pays. Ce sera l’objet d’un prochain texte.

 

 

 

Sources et lectures

Archives départementales des Pyrénées-Atlantiques.

 

Références Archives municipales de Ponte de Lima:

PT/MPTL/GNM-E/CAMM/001/000050  –  PT/MPTL/GNM-E/CAMM/001/000052

PT/MPTL/GNM-E/CAMM/001/000060  –  PT/MPTL/GNM-E/003/000006

PT/MPTL/GNM-E/CAMM/002/000046  –  PT/MPTL/GNM-E/CAMM/002/000047

 

Archives nationales, Répertoire alphabétique des dossiers individuels du Fonds de Moscou.

 

Saisies, spoliations, restitutions: le Fonds de Moscou https://books.openedition.org/pur/130341?lang=fr

Les archives de la direction de la Sûreté rapatriées de Russie: https://www.persee.fr/doc/gazar_0016-5522_1997_num_176_1_3455

 

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