Le voyage à l’unique laboratoire photo argentique en France, Diamantino Labo Photo

Ce qui est devenu le dernier laboratoire photo argentique de France, Diamantino Labo Photo, fête cette année ses 15 ans d’existence.

Diamantino Labo Photo, installé dans la banlieue parisienne, à Bagnolet, est bien plus qu’un simple laboratoire photos, c’est dirions-nous, plutôt un lieu d’art, un lieu d’expérience, la photo sur toutes ses dimensions, tant au niveau réel qu’imaginaire, même si à la question posée à son fondateur, Diamantino da Silva Quintas, “quelle est la définition de votre métier, que faites-vous ?”, ce qu’il répond surprend.

Diamantino se définit comme un non-photographe, quelqu’un qui écrit avec des photos, un nègre, un interprète, un co-auteur.

Un dialogue s’établit entre le photographe, l’artiste photographe, Diamantino et son équipe. Diamantino conseille, il essaie de tirer du négatif le message qu’on veut partager, qu’il a lieu de le partager, que l’artiste veut partager, qu’il y a lieu d’interpréter.

Visiter le laboratoire de photos de Diamantino Quintas, c’est entrer dans une autre dimension, on est étonné par la dimension des photos qui peuvent être en noir et blanc mais aussi en couleur, il y règne un certain calme, concentration, on se sent comme dans un lieu unique où, en dehors de Diamantino, ses collaborateurs, clients/artistes de passage, les 4 chats ont apprivoisé les lieux, ils sont les seigneurs, les premiers à admirer les œuvres, à s’extasier et à pouvoir dormir de longues heures sous les deux oreilles, les confiances sont habituelles entre le patron et les 4 petites boules.

Les appareillages de développement, de séchage, sont à la hauteur de la qualité requise pour un travail d’excellence, mais aussi à la hauteur au vu de leur dimension. De l’expérience vécue, nous concluons que, finalement notre œil s’adapte dans la chambre noire, on finit par voir. Un constat qu’on peut faire relativement vite, toutefois pour bien faire, faire du travail de qualité, d’extrême qualité, il faudra au professionnel travailler, apprendre pendant une dizaine d’années pour percer-voir, pour tirer le meilleur de l’image, du négatif, de la dimension de ce qui deviendra une photo.

On apprend avec Diamantino que, finalement tout peut devenir support de l’image photographiée, à l’image d’un sein projetée, imprimée, sur la partie intérieure d’un œuf d’autruche préalablement découpé, à l’image de la photo sur un gros galet de pierre.

On apprend que finalement on peut faire de la photo sans appareil photo, à l’image de l’expérience en cours d’une artiste italienne, qui travaille en liaison étroite avec le Laboratoire Diamantino, l’impression de la lumière de la lune, à différentes heures de la nuit dans une feuille plongée dans l’eau de mer à une profondeur d’à peine 10 centimètres.

On vient de loin pour confier le développement de photos, à l’image de l’artiste bruxelloise qui ayant voyagé jusqu’à l’arctique en compagnie d’une équipe scientifique a effectué des carottages dans la glace, glace qui fond, devient de l’eau, des gouttes. Des gouttes photographiées, du bleue dans toutes les nuances… le réel qui devient de l’art abstrait, qui, expliqué mieux, on comprend, même si la beauté de la goutte, devenue photo de très grande dimension, s’admire par ce qu’elle dégage grâce au travail de l’artiste photographe, grâce au travail en laboratoire… de celui qui écrit avec des photos, du nègre, de l’interprète, du co-auteur, j’ai nommé Diamantino.

Des expériences, des clichés, l’art qui née ailleurs et qui éclose chez Diamantino, mais qui peut aussi se produire, venir, sortir de l’intérieur du chez Diamantino, à l’image de l’expérience, œuvre d’art sous le thème Nônude-Terrains Vagues, produite le 17 mars, à 16 heures : des images, des photos qui apparaissent, qui se développent sur des corps de femmes dans un environnement de chambre noire, ou plutôt de lumière rouge, couleur qui permet le développement, qui n’abîme pas l’oeuvre mais qui la révèle… l’art, l’art photographique qui rend possible ce qui nous semble, parfois, impossible.

Ici et là, sans vraie mise en valeur, sans être ensemble, les trophées confirment de la qualité du travail réalisé par Diamantino et son équipe : Stars $ Métier 2021, Médaille de l’Excellence Artisanale 2023…

Diamantino da Silva Quintas est né à Neves (Vila de Punhe-Viana do Castelo). Juste après son bac, la soif d’indépendance le conduit à l’engagement à 18 ans dans l’Armée de l’air portugaise. Cela devait devenir son métier. Après trois ans de service, dont deux aux Açores, la rencontre d’une princesse au Portugal le conduit à émigrer vers la France.

Après une formation de 6 mois, à l’Alliance Française, Diamantino intègre un fast-food. Une petite annonce le conduit à une formation de tireur photographe. Les boulots s’enchaînent : d’abord dans un laboratoire de photos développées en une heure, puis il fait des photos de mariages et autres évènements, avant de rentrer vraiment dans ce que Diamantino Quintas considère comme le milieu professionnel, le métier.

Diamantino avait un rêve : s’établir à son compte, de travailler en toute liberté, selon sa conception du métier. L’opportunité découle de l’arrivée du numérique, avec la fermeture de la plupart des laboratoires de photos… occasion pour Diamantino d’ouvrir le sien, de développer son idée, de concevoir, de dire… il y a de la place pour la différence, pour d’autrement, pour l’art.

Les années passent, le repos n’est pas tout à fait pour demain, Diamantino se préoccupe de la transmission, de la formation de bons tireurs-filtreurs, même s’il n’envisage pas de raccrocher le jour de départ en retraite… faire ce qu’on aime, est-ce travailler ?

Un des grands rêves de Diamantino ? Le bonheur qu’il savoure déjà, mais qui se concrétisera, se matérialisera, cet été avec exposition, expérimentation qu’il va vivre, produire, dans son village natal… un retour aux sources. Comme pourrait bien dire Maxime le Forestier, «de Neves ou de Bagnolet pour apprendre à marcher. Être né quelque part… c’est toujours un hasard», mais pas le retour…