L’hôpital militaire portugais d’Hendaye pendant la I Guerre mondiale

L’ancien casino d’Hendaye, construit en 1884, a abrité pendant la I Guerre mondiale, un hôpital militaire. Le bâtiment a été aménagé en 1914 pour accueillir, en premier lieu, des soldats français. Il a ensuite accueilli des Officiers portugais blessés et convalescents, qui devaient être rapatriés vers le Portugal. Les patients ont commencé à y être évacués, du front du Nord, en juin 1918.

C’est en septembre 1914 que la Foncière d’Hendaye et du Sud-Ouest a mis le casino d’Hendaye-plage à la disposition de l’Administration militaire française. Le nouvel aménagement recevait déjà 50 nouveaux blessés. Ensuite M. Martinet, Président du Conseil d’administration de la Foncière, a mis l’établissement à la disposition de Mmes Bernardino Machado et Afonso Costa, Présidentes de la «Cruzada das mulheres portuguezas» (Le journal La Gironde) (lire ICI).

Pour reconnaître les services rendus par les Français, le Gouvernement portugais a accordé des distinctions : l’Ordre du Christ à M. Garat, Député et M. Martinet (Commandeurs), l’Ordre militaire d’Aviz à M. Mourier, Sous-Secrétaire d’Etat et M. Bergasse, Chef du service de santé de la 18ème Région militaire française (Commandeurs), l’Ordre du Christ à M. Fauconnier, Sous-Préfet de Bayonne et M. Adamsky, architecte à Hendaye (Chevaliers), l’Ordre d’Aviz à M. Didier, gestionnaire de l’hôpital militaire de Bayonne (Chevalier) (La Gazette de Biarritz). Le rôle, de ces personnalités distinguées se comprend en lisant le décret traduit et retranscrit à la suite.

En octobre 1917, au cours de son voyage présidentiel en France, le Président Bernardino Machado, accompagné du Chef du Gouvernement Afonso Costa et de M. Martinet, s’était arrêté à Hendaye pour visiter l’hôpital géré par la Croisade des femmes portugaises et futur hôpital militaire portugais.

En août 1917, le journal Ilustração portuguesa annonçait déjà l’installation de l’hôpital avec l’aide du Gouvernement français pour la fourniture du mobilier, ustensiles et vêtements.

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Gouvernement de la République, 9 mai 1918 – Le Ministre de la guerre Sidónio Pais

Le décret 4059, paru en 1918 dans le Diário da República, a publié 11 articles concernant les règles de fonctionnement de l’hôpital militaire portugais d’Hendaye :

Art°1. Cet hôpital aura la même organisation que les hôpitaux de 2ème classe et devra se ranger autant que possible aux dispositions du règlement général du service de santé des armées.

Art°2. Dans cet hôpital, ne travailleront pas des commissions cliniques, mais, lorsque les militaires et officiers y soignés seront jugés incapables d’effectuer le service de campagne, un rapport détaillé signé par au moins par trois médecins sera établi et adressé au Commandant du Corps Expéditionnaire Portugais pour nouvelle décision de la commission qui l’a envoyé à l’hôpital. Sa décision sera définitive, saut si elle juge nécessaire de faire comparaître l’officier ou le soldat. Dans ce cas, il doit se présenter à la commission et, éventuellement, à une autre de recours, si le Commandant du Corps Expéditionnaire Portugais le juge nécessaire ou si l’Officier le demande dans le délai légal.

Art°3. En matière administrative, cet hôpital dépendra directement du Secrétariat de la Guerre et, pour tout sujet sera sous le contrôle de la base des opérations.

Art°4. Son fonds permanent sera de 100.000 francs et celui des dépenses diverses sera de 1.500 francs par mois, le soin journalier par patient sera fixé à 10 francs, comprenant l’eau, l’électricité, fonds versés par les «Dépenses exceptionnelles résultant de la guerre».

Art°5. Le Conseil d’administration est autorisé à financer par son fonds permanent, lors de la fermeture de l’Hôpital Militaire Portugais d’Hendaye, les factures de consommation et de réparation du matériel, gratuitement prêté par le Service de Santé français pour l’installation de cet hôpital, ainsi que les dépenses en travaux d’aménagement du bâtiment, acquisition d’appareils de radiographie et de matériel chirurgical, le solde d’un fonds de 50.000 francs revient à la «Cruzada das Mulheres Portuguesas», pour des dépenses exceptionnelles résultant de la guerre.

Art°6. Le personnel médical sera composé d’un Directeur, officier supérieur, et de quatre médecins, et le personnel infirmier et le secrétariat sera composé de 12 infirmières de guerre, 8 infirmiers caporales 1er ou 2ème, 2 praticiens en pharmacie, un 1er sergent, quatre 2ème sergents et 40 militaires actifs, tous issus de la compagnie de santé, en plus des Officiers participant aux conditions prescrites par le règlement général du service de santé.

Art7. Le personnel en service dans cet hôpital a droit à tous les salaires et pensions réglementés par le décret n°2.865 du 30 décembre 1916, ainsi qu’aux subventions spéciales autorisées dans le Corps Expéditionnaire Portugais pour ceux qui résident en dehors de la caserne permanente.

Art°8. Les salaires des infirmières seront ceux déterminés par les articles 4 et 7 et l’alinéa 1 du décret n°3.307 du 21 août 1917.

Art°9. Les primes, soldes et subventions des patients hospitalisés seront adressés au directeur de l’hôpital pour être déposés au Conseil d’administration à l’ordre des patients respectifs, les allocations seront envoyées à leur demande, en fonction de leurs besoins, et ils devront recevoir le solde, s’il y a lieu, lorsqu’ils seront démobilisés.

Art°10. Le transport des patients jusqu’à la gare d’Hendaye et vice versa ainsi que les rations de voyage seront pris en charge par le Corps Expéditionnaire Portugais.

Art°11. Dans cet établissement, il y aura un dépôt d’uniformes et de vêtements blancs qui seront réquisitionnés au préalable au Dépôt Central des Uniformes, par l’intermédiaire du Secrétariat de la guerre, pour être distribué aux soldats nécessiteux lorsqu’ils seront démobilisés.

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D’autres lectures (voir les sources) donnent des informations complémentaires, parfois différentes.

L’hôpital militaire portugais d’Hendaye (H.M.P.H.) comptait plus d’une centaine de lits, une salle de radiographie et une salle d’opération. Il était destiné à servir de lieu de transition entre la France et le Portugal, pour les patients «récupérables».

Le personnel était constitué d’un Directeur Officier supérieur médical, de 5 médecins ou chirurgiens (parmi eux Alberto Gomes), Capitaines ou subalternes, dont 1 radiologiste, un Chef de secrétariat (Capitaine ou subalterne), d’un Trésorier (Capitaine ou subalterne), d’un pharmacien subalterne, de 12 infirmières au grade équivalent de lieutenants ou insignes, 52 soldats d’active dont 2 barbiers, 2 couturières, 2 cuisiniers et 4 aides, 2 sergents aides en pharmacie, 8 infirmiers, et d’autres … Ceci donnant un effectif de 99 personnes.

Les patients ont été transportés d’Ambleteuse, au nord, jusqu’à Hendaye, au sud, par voie ferrée, d’une gare à une autre, en ambulances de la Croix-Rouge américaine gracieusement mises à disposition pour ce service.

L’H.M.P.H. disposait d’importantes ressources de soins, mais la possibilité d’hospitalisation a été de courte durée. Le premier patient était arrivé le 15 juin 1918, 5 étaient dénombrés jusqu’au 1er août. Le mouvement, lorsque l’hôpital fonctionnait, était d’une centaine de malades.

Parmi les évacués du front du Nord, 2 ont regagné le Portugal, 2 soldats portugais ont été enterrés au Cimetière communal d’Hendaye. Ils ont été exhumés pour être réinhumés au Cimetière militaire portugais de Richebourg. En effet, le 9 juin 1923, l’Attaché militaire du Portugal à Paris (Vitorino Henriques Godinho ?) écrit au Ministère français des Pensions, des Primes et des Allocations de guerre – Service de l’état civil des Successions et Sépultures militaires, pour demander l’autorisation que les corps de 2 soldats portugais morts à l’H.M.P.H soient concentrés en ce lieu unique de Richebourg, travail effectué par la Commission Portugaise des Sépultures de guerre (C.P.S.G.).

Conjointement à l’information donnée au Préfet des Basses-Pyrénées, l’autorisation est accordée par le Ministère français et accordée par l’Attaché militaire à Lisboa, au Président de la C.P.S.G. (lire ICI).

Le couple présidentiel Bernardino Machado se trouvait en exil à Hendaye. Leur fille Maria Francisca est morte d’une pneumonie en octobre 1918 à l’hôpital de la commune. Elle s’investissait beaucoup dans la Croisade des femmes portugaises, en tant qu’infirmière.

Parmi les infirmières portugaises travaillant à l’H.M.P.H se trouvaient Agnete Farmer (nom de famille d’origine non portugaise) ; Maria Eugénia Machado, une autre fille du Président de la République portugaise ; Maria Fernandes, …, Maria de Castro Sá Menezes, arrivée à Hendaye en avril 1918, nommée provisoirement infirmière en chef en août et infirmière en chef en décembre 1918.

L’hôpital militaire portugais d’Hendaye a fermé fin février 1919.

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Sources :

– Journal La Gironde du 16 septembre 1914

– Journal La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz du 4 avril 1919

– Diário da República

– Corpo Expedicionário Português, Organizacão, 1919

– Silêncios e Memórias

– As tropas do 1° grupo de companhias de saúde em França na Grande guerra – Álvaro Martins, 1936

– Estudo de pesquisa sobre a intervenção portuguesa na I Guerra mundial na Flandres, 1995

– Concentração de corpos de militares portugueses no Cemitério de Richebourg L’Avoué, 1921-1922, AHM

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