LusoJornal / Carlos Pereira

Philosophie: Être et finalité du Sars-Cov-2 et phénoménalité du Covid-19

Cabral n’eût pas tort d’affirmer que si l’on enseigne le Mystère de la Trinité aux enfants, on peut leur apprendre le Matérialisme dialectique. En conséquence de quoi, disons-nous, il est possible d’instruire les jeunes et les personnes mûres sur le Covid-19.

Ce texte s’efforce donc de renseigner sur l’être, la phénoménalité (l’essence) et la finalité qui sont à l’œuvre dans ce virus et sa pathologie.

Au fond, la Philosophie, lorsqu’elle n’est pas l’otage extraordinaire des caquetages quotidiens dans lesquels l’ignorance hautaine, par déclamations péremptoires, l’emporte sur le savoir mesuré, a toujours cette fonction d’instruction. Hegel, sans doute le plus grand de tous les grands penseurs, après Platon et Aristote, a philosophiquement pensé «la» maladie, en son concept et son multiple (trois espèces), dans son célèbre Précis de l’Encyclopédie des sciences philosophiques. Lui-même sera emporté, en 1831, par la deuxième pandémie de choléra (1829-1837) qui ravagea l’Europe.

Et, fait remarquable, à la différence et en opposition à Joseph de Jussieu, l’abbé Raynal, Marc Gentilini et Bernard Duflo, il est le seul qui nous assure qu’un «médecin noir, le Docteur Kingera» aura appris l’usage de la Quinine aux Européens; la quinine, rappelons-le, le «seul antipaludique naturel» contre le palu (malaria), dont la nivaquine et la chloroquine, qui font l’objet de tant de débats aujourd’hui, sont des dérivés synthétiques.

Les lignes qui suivent sont extraites d’une communication consacrée à la pandémie du Covid-19 en Afrique, qui paraitra dans un ouvrage collectif d’intellectuels africains ou d’origine africaine. Les notes ont été supprimées.

 

Qu’est-ce que le Virus-à-couronne?

Rappelons que le Virus-à-couronne SARS-CoV-2 est responsable d’abord et surtout d’une anthropozoonose, définie comme une infection initialement propagée des mammifères à l’homme, par leur consommation ou leur proximité. Il a donc franchi la barrière des espèces, devenant alors bien plus virulent. Mais ce changement d’hôte n’est possible que sur fond d’un processus biologique: mutation – pénétration – conversion – réplication du virus. La civette palmiste masquée (Chine, 2002), le chameau (Arabie Saoudite, 2012), la chauve-souris et le pangolin (Chine, 2019), «espèces-réservoir», sont réputés être les disséminateurs et les transmetteurs des Coronavirus récemment apparus.

Ainsi, la pandémie en cours est la transformation continue du SRAS-CoV-2 en Covid-19, du Covid-19 en SARS-CoV-2, elle est donc leur différence et unité dialectiques, le passage permanent de l’un dans l’autre et vice-versa qui, dans le mouvement de sa propre propagation, touche tous les peuples de la Terre.

Jusqu’ici, nul n’a interrogé ou mis au débat la question de savoir si le SARS-CoV-2 portait une finalité. Un tel état de fait tient en ce que la pensée ne l’a pas encore constitué comme objet à part entière ou en thème philosophique. Or, pour cela, cette question requiert une approche polymathique (savoir approfondi en plusieurs domaines), en particulier de la Métaphysique qui s’est toujours intéressée à la question de la finalité des choses qu’elle a appelé téléologie.

Sans aller plus avant, appelons une vieille formule: «le commencement est but [finalité]». Le mouvement des choses (objets ou phénomènes) est-il orienté vers une fin ou absurde, aveugle, sans but? Tous les grands philosophes et scientifiques, en maints domaines, l’ont discutée. L’un d’eux, parmi les historiens les plus célèbres, redira l’antique formule: «Le commencement est la moitié du tout». Mais Polybe, qui l’évoque ici, ajoutera non sans vérité: «on peut affirmer hardiment que le commencement n’est pas seulement la moitié du tout, mais que la fin même en dépend». Les Grecs anciens l’avaient bien compris et en avaient une claire conscience. Schopenhauer réfutera le principe de finalité: «Ce n’est pas un intellect, écrit-il, qui a créé la nature, mais la nature qui a créé l’intellect. C’est bien la Volonté qui se manifeste partout comme élément originel: elle remplit tout et apparaît immédiatement en toutes choses, les désignant par là même comme son phénomène. Ainsi, tous les faits téléologiques s’expliquent justement par la Volonté de l’être même dans lequel on le constate.

Au reste, la preuve physico-théologique est infirmée déjà par la remarque empirique suivante: les œuvres de l’instinct supérieur des animaux, la toile d’araignée, les alvéoles des abeilles, les constructions des termites, etc. semblent être nées d’une intention précise, d’une prévoyance à long terme et d’une réflexion raisonnable, alors qu’elles manifestent d’un instinct aveugle, c’est-à-dire d’une Volonté non guidée par la connaissance. Il s’ensuit qu’on ne saurait conclure sûrement d’une telle manière d’être à une telle origine, comme on le fait partout de conséquence à cause».

Mais alors, si tel est le cas, cet «instinct» ne serait donc pas si «aveugle» que l’affirme Schopenhauer, puisqu’il est tout à fait adéquat à lui-même, comme il le dit par ailleurs. Car, pour être adéquat à soi-même, on peut tout être sauf «aveugle». Ainsi, le principal argument de la doctrine schopenhauerienne sur la Volonté, qui tire ses exemples de la Nature, se réfute elle-même. Il ne peut en être autrement, parce que le principe téléologique (finalité, but) contredit et n’admet pas d’aveuglement, que sa source soit intérieure ou extérieure. C’est pourquoi, dans sa Préface à La Phénoménologie de l’Esprit, Hegel amplifiera cette pensée en posant le principe téléologique dès le début, renouant avec le dire de Polybe: «Ce qui a été dit peut encore être exprimé de cette façon: la raison est l’opération conforme à un but […] Le résultat est ce qu’est le commencement parce que le commencement est but».

Si le principe téléologique est posé comme vrai et adéquat, il vient aussitôt au jour la question suivante: quelle est donc et comment se dévoile la finalité (le but) du SARS-CoV-2? En définitive, sa mutation depuis le virus de la chauve-souris n’obéit pas, pour lui, au besoin de migrer de l’animal à l’homme (anthropozoonose), puisqu’il n’a originellement migré que par la consommation de sa viande. Au vrai, sa mutation obéit à la nécessité vitale de trouver et de coloniser, chez les eucaryotes, des cellules alvéolaires respiratoires, où sont précisément présents les organites spécialisés dans la respiration (mitochondries chez les aérobies), afin de s’y loger et, pour ainsi dire, d’en faire un habitacle ou un habitat et de satisfaire aux conditions indispensables à sa réplication.

Autrement dit, la mutation du virus est tirée (guidée) par sa finalité; son être (viral) et son essence (mutation, pénétration, réplication et infection) sont déterminées par sa finalité ou, ce qui revient au même, son être et son essence déterminent sa finalité.

On comprend dès lors bien mieux pourquoi le but (la finalité) du SARS-CoV-2 n’est pas la mort de l’individu malade, son hôte, par l’état (tableau) de choc, mais comment la mort de ce malade-là est occasionnée par les réactions (immunitaires) défensives du malade. Ainsi, peut-on dire, à la suite de Hegel, que le malade ne meurt que par et de lui-même, en se défendant et donc, de façon contradictoire, dans sa lutte (dialectique contre son contraire) pour sa propre survie. Par conséquent, il meurt par son «être même», c’est-à-dire selon la maladie originaire. La cause de sa mort est, ici, intérieure (auto-défense) et non extérieure (virus de la chauve-souris ou SARS-CoV-2 et Covid-19).

La polémique scientifique actuelle sur l’origine naturelle (par mutation d’un Coronavirus de chauve-souris) ou synthétique (fabrication par hybridation de séquences VIH) du SARS-CoV-2, qui a été ouverte par le Professeur et Nobel de médecine Luc Montagnier, n’entre pas dans le champ de cet article, en dépit de son indéniable acuité. Car, malgré son quadruple intérêt virologique, épistémologique, militaire (guerre bactériologique) et politique, il n’ajoute rien à l’article de savoir si le Virus-à-couronne a été fabriqué par le séquençage d’un génome viral, en déterminant puis en modifiant la «séquence nucléotidique» (succession des bases le long d’un brin d’ADN) d’une cellule de chauve-souris du Laboratoire P4 de Wuhan (Chine) ou s’il ne s’agit que de la mutation naturelle d’un virus d’animal et de son inopportune transmission à l’homme. Cette question fera l’objet d’une autre réflexion.

Pour lors, signalons que quatre genres de Coronavirus ont été mis au jour et dénommés Alpha, Beta, Delta et Gammacoronavirus. Ce sont les alpha et les beta coronavirus qui infectent les mammifères y compris les hommes, tandis que les Gamma ne concernent que les oiseaux domestiques.

Les alpha-coronavirus (α-coronavirus ou Alpha-CoV) sont des virus à ARN simple brin (ou monocaténaire, c’est-à-dire non apparié à une autre molécule), de sens positif et d’origine zoonotique. En on dénombre quatre, 229E, NL63, OC43 et HK41, qui occasionnent des pathologies de formes bénignes (un tiers des rhumes, diarrhée, etc.), alors que les beta-coronavirus (β-coronavirus), trois en tout, provoquent des pneumopathies sévères à l’origine d’épidémies antérieures (SARS-CoV et MERS-CoV) et surtout de la pandémie en cours: le SARS-CoV-2. C’est ce dernier qui nous intéresse tout d’abord sous l’angle symptomatique (signes cliniques), puis selon une observation qui pose, sur lui, un regard biologique, pour le saisir tel qu’il est (être et phénoménalité) qui détermine sa finalité biologique (reproduction et infection). Au reste, ce regard-là écarte toute considération religieuse (punition divine), toute approche magico-fétichiste (manquement au culte des ancêtres ou aux mânes) et toute doctrine fataliste (résignation ou déterminisme), pour n’y voir qu’une action virale (naturelle ou créée).

Les virologues, les infectiologues, les épidémiologistes et les médecins (généralistes et spécialistes) s’accordent pour répertorier les principaux symptômes suivants: de la fièvre, une toux (sèche), une perte de l’odorat (anosmie) et du gout (agueusie), une gêne respiratoire (dyspnée) qui peut rapidement s’aggraver avec hypoxémie (diminution forte de la quantité d’oxygène transportée dans le sang et due à un mauvais échange entre alvéoles pulmonaires endommagées et capillaires sanguins), voire une détresse respiratoire, un mal de tête (céphalée) et des douleurs musculaires. Un tableau de choc5 avec atteinte cardiaque, rénale ou hépatique fait la gravité de la maladie qui peut être fatale. On peut également observer une lymphopénie (réduction des lymphocytes, une variété de globules blancs).

Observons à présent le SARS-CoV-2 au microscope électronique. C’est un génome viral de type ARN (acide ribonucléique), avec un seul brin de polarité positive. Il est renfermé dans une capside (couche protéïque externe) elle-même logée dans une enveloppe virale dont certaines protéines ont la forme de pic6 permettant sa pénétration dans les cellules pulmonaires alvéolaires pour en devenir les hôtes; phase importante et décisive, c’est durant son incubation (5 à 6 jours) qu’il met en œuvre sa réplication, de laquelle résulte (directement ou non) une pneumonie sévère ou une insuffisance respiratoire aigüe, suite à la destruction des alvéoles qui sont à l’endroit des échanges gazeux permettant le passage de l’oxygène de l’air vers le sang.

En s’introduisant, le Virus-à-couronne parvient à infecter, en partie ou en totalité, les alvéoles pulmonaires des individus, en s’y démultipliant, avant de se propager à d’autres individus par voie aérienne (postillons, éternuements, toux et crachats, etc.) ou en se déposant sur la surface d’un objet dès lors «contaminée». C’est alors la maladie proprement dite, le Codiv-19 due au SARS-CoV-2 (agent pathogène, virus pneumonique).

Nous ne devons pas confondre le SARS-CoV-2 et le Covid-19. Le premier, qui relève de la «raison théorique», est le second en puissance, tandis que le second, qui relève de la «raison pratique», est le premier en tant qu’il s’est accompli et propagé.

Il convient maintenant de décrire, de façon succincte, le mode opératoire de pénétration du Virus-à-couronne, ce qui oblige à quelques brèves considérations de biologie générale et de biologie moléculaire.

Pour «ouvrir» et «entrer» dans une cellule, afin de l’infecter, il doit impérativement trouver une «porte d’entrée» (un «site de liaison»: pour lui, l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2), son «récepteur»; mais il doit aussi posséder une «clé», son fameux pic (sa glycoprotéine de surface ou Spicule, protubérance trimérique dite «S»). Et après être entré dans le cytoplasme (milieu intérieur de la cellule riche en nutriments), le génome viral à brin linéaire d’ARN de polarité positive, se libère (sort) de sa capside (coque), l’abandonne, pour aussitôt se fixer sur les ribosomes (constitués d’ARN et lieu de synthèse des protéines), afin de faire décoder et de traduire (l’information présente dans l’ARNm de) ce «brin positif» et, ainsi, produire des protéines virales nécessaires à sa propre réplication et qui, en cela même, termine la traduction d’un ARN en protéine7.

C’est qu’une protéine virale, la réplicase, ne reconnaît et ne produit que l’ARN viral et permet au génome viral d’être transcrit en nouvelle copie d’ARN. En outre, cette transcription8 de l’ARN du génome viral en brin d’ARN négatif permet, grâce à la machinerie de la cellule hôte, de synthétiser les autres protéines virales. De la sorte, de nouvelles particules virales vont s’assembler dans la cellule, pour être ensuite libérées avant d’aller contaminer d’autres cellules et/ou être expulsées ou réexpulsées dans les sécrétions aériennes et transmises ou retransmises à d’autres individus.

Dans sa forme bégnine, le virus est reconnu par les systèmes de défense de l’organisme et éliminé, avec production d’anticorps (immunoglobulines IgG et IgM). Toutefois, il est capable de bloquer certains de ces mécanismes et, au contraire, provoquer une réaction exagérée du système immunitaire, il peut avoir un rôle pathogène, sous la forme d’une production massive de messages moléculaires appelés cytokines. On parle alors d’un «orage cytokinique» qui est impliqué dans la dégradation des fonctions vitales du malade. Il est à signaler que cette «libération de cytokines» participe d’un «choc septique».

 

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