LusoJornal / Dominique Stoenesco

«Témoigner pour rompre le silence»: Présentation de «Exílios.2» à la Librairie Portugaise et Brésilienne

Vendredi dernier, le 18 mai, a eu lieu à la Librairie Portugaise et Brésilienne, à Paris, la présentation du livre «Exílios.2», en présence d’exilés et de déserteurs de la guerre coloniale en Afrique et du régime salazariste.

Après la parution du premier volume, «Exílios», en 2016, ce deuxième volume, publié également par l’AEP61-74 (Association des Exilés Politiques Portugais – Lisbonne), réunit 29 autres témoignages de femmes et d’hommes qui ont vécu divers types d’exils, à travers des parcours mouvementés qui ont souvent bouleversé définitivement leurs vies.

La somme de ces témoignages individuels constitue indéniablement la force d’une mémoire collective, contribuant ainsi à l’écriture d’une histoire au présent. Par ailleurs, l’intérêt de «Exílios.2» réside également dans le fait que cet ouvrage permet, comme le souligne Miguel Cardina dans la préface, d’aborder une question, celle de la désertion, qui aujourd’hui encore est «polémique et presque taboue» au Portugal. «Sans avoir la prétention – nous dit Miguel Cardina – de présenter un tableau représentatif de tous les parcours de désertion, les voix qui témoignent dans ce livre nous obligent, en brisant le silence, à considérer la désertion comme partie intégrante de l’histoire de la résistance face à la dictature et à la guerre coloniale».

La présentation de «Exílios.2», dont le sous-titre est précisément «Testemunhos de exilados e desertores portugueses (1961-1974)», a été faite par Fernando Cardoso, Président de l’AEP61-74 et Coordinateur de la publication, et par Sónia Ferreira, Anthropologue à l’Université de Paris Diderot.

Dans son exposé, qui permettait de contextualiser le thème et qui invitait le public à une réflexion plus large, Sónia Ferreira a abordé les points suivants: le silence, l’oubli et l’inscription de l’exil dans l’histoire; comment étudier l’exil, au passé ou au présent; les questions de genre; la construction des réseaux, le militantisme et la solidarité.

Ces deux interventions ont été suivies d’un débat très riche et animé au cours duquel plusieurs exilés et déserteurs ont pu évoquer leurs parcours et expliquer les raisons pour lesquelles ils témoignent aujourd’hui.

De la diversité de leurs témoignages et de leurs différentes positions politiques concernant ces questions, il en ressort toutefois quelques points communs: l’engagement total contre la guerre coloniale, la volonté de rompre le silence actuel sur ces thèmes et de les insérer dans le débat politique général.

Enfin, les échanges autour de «Exílios.2» ont montré aussi combien la reconstruction de la mémoire est un long cheminement semé d’interrogations, d’écueils et de tourments. Si, d’une part, la mémoire a besoin de temps pour se libérer, en l’occurrence environ cinquante ans, d’autre part, plus ce temps est long plus les souvenirs s’estompent… D’où tout l’intérêt de cette publication.

 

 

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