Les origines de la bande dessinée au Portugal. Évocation de Leal da Câmara

Du 24 au 27 janvier se tient à Angoulême le 46ème Festival de la bande dessinée, moment choisi pour qu’on se pose la question de comment se porte le 9ème art au Portugal.

Rien de comparable à la Belgique! Nombreux sont les auteurs au pays d’Hergé, dont la renommée n’est plus à faire. Pays de tradition et où le nombre d’auteurs est de qualité. Posséder les premières éditions des Tintins, du Jules Verne de la BD, Hergé, peut valoir son pesant d’or.

Au Portugal peu d’auteurs ont vécu ou vivent de cet art.

Le Portugal n’a pas d’équivalent de Charlie Hebdo ou du Canard Enchaîné.

Le dessinateur que nous avons interviewé en 2016 pour LusoJornal, Osvaldo Medina, à la question «réussi-t-on à vivre de la BD au Portugal?». Il nous a répondu être bien difficile d’en vivre. Le dessinateur humoristique au Portugal, comme d’une façon générale ailleurs, scrute la société et la dessine, les commandes venant essentiellement de quelques journaux quotidiens et hebdomadaires.

Richesse et particularité: le dessinateur réussit avec des simples traits à dire plus, que, parfois, un long discours ou un long article… nous ne savons pas dessiner!

Ceci étant dit, quelques rares peintres caricaturistes portugais ont eu une carrière internationale, parfois aussi par la force des choses: tel a été de cas de Leal da Câmara.

L’origine de la bande dessinée au Portugal, selon les historiens on la situe entre 1744 et 1921.

Pour quelques historiens, la BD portugaise aurait eu ses débuts en 1744, date à laquelle on a construit le Padrão do Senhor Roubado, monument situé à Lisboa qui de forme séquentielle raconte sur des panneaux d’azulejos l’histoire du vol de l’église Matriz d’Odivelas.

D’autres affirment que la BD portugaise aurait eu ses débuts en 1850 avec la publication du premier numéro de «Aventuras sentimentais e dramáticas do Senhor Simplicio Baptista».

Pour finir, selon d’autres spécialistes, la BD portugaise a ses origines en 1921 avec la publication de la première bande dessinée pour enfants, 100% portugaise: ABC-zinho.

Raphaël Bordallo Pinheiro qui est née en 1846 et décédé en 1905, est considéré comme étant l’auteur qui a le plus influencé le début de la Bande Dessinée au Portugal. Il a publié son premier cahier en 1870 «Calcanhar d’Aquiles». En cette même année il lance la revue «A Berlinda».

Le plus international de nos auteurs de BD fut Leal da Câmara. Il est né en 1876 à Panaji (Inde portugaise). Marie-Christine Volovitch-Tavares, auteur du superbe livre «Cent ans d’histoire des Portugais en France» publié fin 2016, nous rappelle dans l’introduction de son livre, très bien documenté et facile à lire, que Leal da Câmara, auteur opposé à la censure monarchique, a vécu en France entre 1900 et 1910. Dessinateur reconnu, il a dessiné pour «Rire», «Gildas Blas» et pour le très populaire, objet de collection et très prisé dans les braderies et brocantes, la revue «L’assiette au Beurre».

Il rentre au Portugal et s’installe à Porto après l’implantation de la République en 1910. Fervent défenseur de l’idéal républicain, il publie en 1898 des nombreuses caricatures contre la Monarchie et l’Aristocratie. Il expose dès 1912 et participe à plusieurs manifestations organisées par Salões dos Humoristas e Modernistas do Porto.

Pendant la guerre de 1914-1918 il continue son travail d’artiste humoristique. De retour du Brésil en 1922, il se consacre à l’illustration de livres pour enfants.

Leal da Câmara décédera en 1948 à Rinchoa, près de Sintra, dans une maison où il a vécu de 1930 jusqu’à sa mort. Cette demeure est, depuis, devenue un musée en son honneur grâce à la volonté de sa veuve, Júlia d’Azevedo (1894-1965).

De ses dessins les plus connus, citons ici la couverture de «L’assiette au Beurre» n°243, du 25 novembre 1905, lors d’une des visites du roi don Carlos à Paris, sans doute pour aller à la chasse, lui qui était grand amateur de gros gibier. La tête du roi don Carlos occupe toute la couverture, les traits sont évidemment exagérés avec une belle moustache et un gros cigare, de quoi mécontenter na Monarchie et le Monarque.

De notre jeunesse, nous nous rappelons des livres de «1era classe»… «terceira classe». La bande dessinée sur les livres scolaires était, à l’époque, utilisée par le régime de Salazar pour propager et imposer ses idées.

Autres temps… autres censures.

 

[pro_ad_display_adzone id=”20983″]