Un livre de mémoires : “Quando a mina de Ervedosa falava francês 1909-1917” de Celina Busto Fernandes

Celina Busto Fernandes vient d’éditer «Quando a mina de Ervedosa falava francês 1909-1917 – Société des mines d’étain d’Ervedosa». Un puzzle qui se complète, après un premier travail déjà de Celina, «As minas de Ervedosa 1906-1969 – Efigie de memórias e narrativas».

Dans le premier travail, l’auteure rassemble, décrit, ce qu’elle a appris à partir de témoignages de ceux qui ont travaillé dans ces mines et de recherches dans des archives, travail consacré essentiellement à la période anglaise des mines qui va de 1920 à 1969, année de la faillite.

Ce premier livre arrive aux mains de descendants des propriétaires français de la mine, début du XXème siècle.

Le 15 juillet 2015 Jean Rollin écrit le mail : «Je suis à la recherche de Celina Maria Busto Fernandes qui a écrit un livre ‘As Minas de Ervedosa 1906-1969’ et qui, d’après sa biographie sur internet, travaillerait actuellement dans votre ‘Centro de Documentação’. Son livre m’intéresse car mon arrière-grand-père maternel, Fernand Maillet, a travaillé aux mines d’Ervedosa de 1906 à 1920, il était ami et sous les ordres de Monsieur Carpentier. J’ai également un certain nombre de photos de cette époque que je serais heureux de lui scanner. Je suis allé plusieurs fois à Ervedosa sur le site des mines et je pense que j’y reviendrai encore pour des raisons sentimentales. Cordialement».

De ce message, naissent des échanges entre Celina Busto et la famille de Jean Rollin, ce dernier disparaissant malheureusement peu après le premier contact. L’idée d’un nouveau livre sur l’histoire des mines d’Ervedosa fait son chemin, les mines d’Ervedosa étant parmi les plus importantes de la Péninsule Ibérique de l’époque.

Le domaine minier d’Ervedosa est situé dans les paroisses d’Ervedosa et Vale das Fontes, dans la municipalité de Vinhais et fait partie de la région naturelle de Bragança, présentant une complexité géologique particulière propice à l’activité minière. Autrefois gisement d’importance nationale, la mine d’Ervedosa est aujourd’hui un ensemble de ruines. Les seules structures qui ont résisté à l’épreuve du temps sont les maisons des anciens employés, qui sont encore habitées aujourd’hui. Les premières références au gisement remontent à 1857, et après des décennies d’exploration et d’extraction de minéraux, notamment d’arsenic et d’étain, les mines ont fermé en 1969.

Celina Busto Fernandes est originaire de Trás-os-Montes, comme l’écrivain Miguel Torga, qu’elle admire et lit. L’auteure met en pratique les dires de Miguel Torga, un des écrivains majeurs portugais du XXème siècle : «Recommence… si tu peux, sans angoisse et sans hâte. Et quels que soient les pas que tu feras sur ce chemin difficile vers l’avenir, fais-les en toute liberté. Ne te repose pas tant que tu ne l’as pas atteint. D’aucun fruit tu ne veux que la moitié…».

Le résultat ? Le livre : «Quando a mina de Ervedosa falava francês 1909-1917 – Société des mines d’Ervedosa».

Dans la préface Celina Busto Fernandes remercie «à la mémoire de Jean Rollin. Sans lui l’histoire des mines serait incomplète. À la famille Carpentier. À la famille Maillet. Aux familles minières. À Orlando et Rita. Jean Rollin m’a contacté en 2015 pour me proposer une vaste et riche collection de photographies du début des travaux miniers dans les mines d’Ervedosa. Jean Rollin était l’arrière-petit-fils de Fernand Maillet et petit-fils d’Armand Maillet, qui vécut et travailla dans ces mines pendant quelques années, comme nous l’expliquerons tout au long de cet ouvrage. Mon hommage va à Jean Rollin qui a déposé entre mes mains ce fonds photographique, probablement avec l’espoir qu’il soit publié, c’est un honneur de le partager avec tous ceux qui ont accès à cette œuvre».

Les images qui peuplent les pages de ce nouveau livre de Celina Busto Fernandes, jusqu’à présent réservées à leurs propriétaires, témoignent de moments d’interaction avec des travailleurs et des personnes des communautés locales, des poses qui perpétuent des moments uniques désormais sur papier, sous nos yeux. Cependant, le livre fait également référence à des moments plus privés, lorsqu’il retranscrit, et rend publique, une partie de la correspondance.

La documentation sélectionnée par l’auteure témoigne de l’évolution des travaux miniers et du site industriel lui-même, avec ses fouilles, ses terrils et ses ateliers de traitement des minéraux extraits des filons de quartz dans les profondeurs de la roche granitique. Des éléments qui, en fait, avec une autre dimension et des objectifs, avaient déjà été compilés dans son livre précédent «As Minas de Ervedosa (1906-1969) – Efigie de Memória e Narrativa».

Mais si la mine avait été établie et développée depuis 1909, avec des machines et des connaissances importées, des ateliers, des fourneaux et des logements pour le personnel technique et les ouvriers, si les Français s’étaient adaptés aux mœurs d’un Portugal profond et ignoré, y travaillant et créant des emplois, la I Guerre mondiale viendra interrompre brusquement et tragiquement leurs rêves de vie, le progrès technique et industriel.

La I Guerre mondiale a marqué le monde, la France, le Portugal, la famille Carpentier qui exploitait les mines d’Ervedosa. Une vie d’évènements entrepreneuriaux heureux, de progrès, une famille installée et prévoyant son avenir au Portugal, la guerre et ses drames en dictent un autre destin.

Le livre de Celina Busto Fernandes, de 212 pages, se décline en 5 chapitres : 1- Deux Familles Françaises : Carpentier et Maillet ; 2- Les concessions minières ; 3- Mines d’Ervedosa, construction et progrès ; 4- La vie sociale des mines d’Ervedosa ; 5- La correspondance de la famille Carpentier pendant la I Guerre mondiale.

Presque une centaine de photos de l’époque, sur les lieux, la vie et des deux familles françaises, illustrent ce beau livre de mémoires, pour la mémoire dans un contexte où le tourisme de mémoire-industriel prend, et heureusement, de plus en plus d’importance.