La courte mais riche vie du pilote portugais Oscar Monteiro Torres, mort en combat, le 19 novembre 1917

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Óscar Monteiro Torres restera dans l’histoire du Portugal comme étant le premier et unique, à ce jour, pilote d’aviation portugais abattu en combat. L’avion SPAD S.VII, n°S7C1, 4268 qu’il pilotait a été touché le 19 novembre 1917 alors qu’il volait à 4.000 mètres de hauteur du côté de Laon (Aisne).

LusoJornal a évoqué à plusieurs reprises l’histoire de cet aviateur (ler AQUI e AQUI), du début de l’aviation portugaise (ler AQUI) et le fait qu’une pierre tombale, à son nom, soit à l’intérieur du petit local de rangements, au fond à gauche, dans le Cimetière militaire portugais de Richebourg (ler AQUI).

Ce que nous allons décrire ici fait partie des aspects moins traités de la courte, mais remplie, parfois même étonnante, vie d’Óscar Monteiro Torres.

Petit rappel bibliographique : Óscar Monteiro Torres est né à Luanda (Angola), le 26 mars 1889. Il a fréquenté très jeune, dès l’âge de 11 ans, le Colégio Militar de Lisboa et l’Escola do Exército à 20 ans. Il revient en Angola, le 1 décembre 1911 en tant que Lieutenant. De retour en métropole, il intègre le Regimento de Cavalaria n°4, avant d’avoir une nouvelle nomination en Angola.

Ses idées politiques vont le conduire à l’exil. Son républicanisme le fait adhérer, pendant une courte période, au Partido Unionista, défendant l’intervention du Portugal dans la I Guerre mondiale. Exilé en Angleterre, il est considéré déserteur le 17 mars 1915.

Après le départ du Gouvernement de Pimenta de Castro, en tant que Président du Ministère (actuel Premier Ministre), le 14 mai 1915, Óscar Monteiro Torres revient au Portugal et est appelé par le Ministre de la guerre, Norton de Matos, en tant que son Adjoint. Dans une vie très mouvementée, il se rend à nouveau en Angleterre pour obtenir le Brevet de pilote et puis à Pau, en France, pour se perfectionner.

Par manque d’aviation de combat au Portugal, Óscar Monteiro Torres demande l’autorisation de servir la France, où il a intégré l’Escadron 65, Escadron des Cigognes, basé à Soissons.

Le 19 novembre 1917 il part en patrouille avec le Capitaine Lamy. Tous deux sont poursuivis par des avions allemands. Le Capitaine Lamy réussit une manœuvre qui le met hors du champ ennemi. Óscar Monteiro Torres est pris en charge par les deux avions allemands et est finalement abattu par le pilote allemand Rudolf Fokke. Il meurt le lendemain dans l’hôpital militaire de Laon. Il a été, dans un premier temps, enterré avec des honneurs militaires allemands dans le cimetière de Laon.

Le Jornal ‘O Século’ écrivait ainsi sur Óscar Monteiro Torres : «Son empressement à partir pour le champ de bataille était connu de tous ceux qui le rencontraient à Paris, et si bien que, voyant que les services de l’aviation de notre Corps expéditionnaire tardait à s’organiser, il réussit à intéresser Guynemer et à presser le Ministère de la Guerre d’être admis à faire partie de la fameuse bande des ‘Cigognes’. La demande allait être accordée à la mort de Guynemer».

Óscar Monteiro Torres est alors rattaché au 65ème escadron d’avions Spad, «l’un des plus actifs et des plus distingués par ses prouesses».

C’est également le journal ‘O Século’, dans la rubrique «fait divers» daté du 26 novembre 1918 qui relate : «Le 19, il était parti en compagnie du Capitaine Lamy. Les deux aviateurs ont rencontré un groupe de cinq avions ennemis. Deux d’entre eux ont attaqué l’avion de Monteiro Torres. Notre compatriote a abattu l’un des avions allemands, cependant, attaqués par trois autres Allemands, le Capitaine Lamy réussit à s’échapper. Les ennemis l’ont poursuivi pendant un certain temps, mais ont ensuite rejoint celui qui restait en train de combattre avec Monteiro Torres. C’est alors qu’entouré des quatre Allemands et après avoir lutté désespérément contre eux, pendant quelques instants, que l’aviateur portugais succomba. Comment a-t-il été touché? Il est impossible de le préciser. Ce que l’on sait, nous le répétons, c’est que son appareil est tombé de très haut, impuissant sur les lignes allemandes».

Cette nouvelle parvient à Maria Monteiro Torres, épouse du pilote portugais. Publié dans le journal ‘O Século’ sous-titre «Il est confirmé avoir péri au combat avec l’ennemi», le journal a confirmé, par une lettre de l’éditeur à Paris, que l’aviateur était mort. «L’avion qu’il pilotait s’est écrasé d’une hauteur d’environ 4.000 mètres, s’est retrouvé dans une forêt occupée par les Allemands et, bien qu’il n’y ait pas d’autres nouvelles sur le fait, tout porte à croire que l’aviateur n’aurait pas pu survivre à cette chute».

Pendant un an, Maria Monteiro Torres écrit 7 lettres à Óscar Monteiro Torres, des lettres qui n’ont jamais été, évidemment, transmises à son mari défunt. Marie ne les a pas, non plus, récupérées.

Cent ans plus tard, le seul – et dernier – descendant direct de l’aviateur, les a lues.

Maria Monteiro Torres n’a pas cru – n’a pas voulu croire – en la mort de son mari. Elle a écrit divers courriers pour essayer d’avoir des nouvelles de son mari pilote. Elle a reçu même plusieurs réponses qui ne confirment pas la mort d’Óscar Monteiro Torres. À titre d’exemple, le 20 janvier 1918, le Comité Portugais de Secours, répondait à Maria Correia Monteiro Torres : «…selon des communications antérieures, il se trouve prisonnier dans un des divers champs de prisonniers allemands… ».

Au deuxième étage du numéro 25, avenida Defensores de Chaves, à Lisboa, Maria Correia Monteiro Torres attend. Elle partageait la défense inconditionnelle du pays d’Óscar, considérait son mari comme un vaillant soldat et avait un immense amour pour lui.

Maria et Óscar se sont rencontrés lors d’un bal, à Lisboa, le 15 janvier 1908. Óscar était sur le point d’avoir 19 ans, Maria en avait encore 17. Les deux familles aisées fréquentent la haute société lisboète, et c’est ainsi que commença l’amour entre Maria Carolina Lima Correia et Óscar Monteiro Torres.

De la vie pittoresque d’Óscar Monteiro Torres, le journal ‘Illustration Portugaise’ raconte que «c’est au coup d’épée que le républicain Óscar Monteiro Torres, Officier de cavalerie, se heurte à Cristóvão Aires, militaire, journaliste et monarchiste, amis d’arme. Le duel a eu lieu à 18h30, le 16 juin 1915, à Estrada da Ameixoeira, à Lisboa». Dans le Diário de Lisboa, dans un récit publié en 1945, qui rappelle le jour où les deux se sont affrontés, Óscar Monteiro Torres est décrit comme un homme «grand et droit, avec quelque chose de léger comme seuls les hommes ailés ont».

«Des centaines de personnes» regardaient et sur la place «soixante-trois voitures s’étaient arrêtées». D’après un rapport exhaustif du journaliste Artur Portela, chacun des duellistes était habillé et le résultat : «Enfin, à la deuxième minute du septième round, le sabre d’Óscar Monteiro Torres coupe l’avant-bras provoquant une blessure de six centimètres du antagoniste. Les médecins suspendent le combat. Déjà coulant le sang – celui qui laisse l’honneur immaculé. La foule quitte silencieusement les lieux».

Oscar Monteiro Torres sera décoré à titre posthume avec la Légion d’Honneur et la Croix de Guerre de la part du Gouvernement français et de la Médaille Croix de Guerre et Torre et Espada par le Gouvernement portugais.

Le 22 juin 1930, une cérémonie a eu lieu, les restes mortels du valeureux étant déposés dans le Cimetière du Alto de São João, à Lisboa.

Nous apprenons en consultant le livre d’António Ventura : «A Maçonaria portuguesa e a Grande Guerra 1914-1918» (éditions Vega) qu’Óscar Monteiro Torres a été Franc-maçon. Différents documents du Grande Oriente Lusitano Unido évoquent son nom. Dans un communiqué du 16 juin 1930, du Grémio Lusitano, on peut y lire : «…vaillant républicain, travailleur, très serviable de notre auguste ordre…. mérite bien que tout notre peuple l’accompagne jusqu’à sa dernière demeure dans une manifestation ordonnée d’hommage salutaire…» Signé par le Grand Secrétaire Général de l’Ordre.

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