LusoJornal / António Marrucho

Opinion: Religion, liberté, laïcité

Nous habitons dans une ville qui a pour nom: Croix.

La croix est, dans la religion catholique, symbole à la fois de souffrance, mais aussi de délivrance.

Nous sommes croyants, mais pas régulièrement pratiquants.

Un évènement nous conduit à écrire les lignes qui suivent: ce samedi, nous avons assisté à l’office religieux. Il y avait Dieu, il y avait des hommes… et il y avait des colombes…

Les colombes, symboles de liberté, symbole de paix… ce sont elles qui ont déclenché cet écrit.

Nous fréquentons énormément d’amis athées et/ou agnostiques. Je les admets, je les comprends, le contraire est également réciproque.

Qui se pose le plus de questions: ceux qui croient, ceux qui cherchent, ceux qui ne croient pas ou plus, ceux qui ont abandonné d’y croire?

On nous dit souvent que la religion c’est l’esclavage de l’homme, être croyant c’est d’une certaine façon fermer les yeux sur des certaines vérités, sur des souffrances, sur la liberté.

Il est vrai que nier certains actes du passé et même du présent sous prétexte de la religion, sous prétexte d’interprétation des textes anciens, beaucoup d’entre nous le faisons, nous nous voilons, parfois, les yeux.

Des évènements récents, certaines attitudes d’une partie du clergé posent question, toutefois faut-il arrêter de croire?

Dans tous les milieux il y a des bonnes et moins bonnes personnes. Chaque groupe humain n’est-il pas un condensé de notre monde? Ne prenons-nous, parfois, aussi, des exceptions pour des règles? Il y aurait beaucoup à dire sur ce thème…

Aller à l’église est parfois une nécessité. On y retrouve un peu de silence, du repos, on prend le temps… un bien nécessaire pour quelques-uns d’entre nous.

Aller à l’église cela peut être une habitude, certes, pour nous, nous n’y allons pas en fonction ou qu’en fonction de celui qui dirige l’office, mais pour celui qu’il représente. Et celui qu’il représente est bon, il prône la paix, l’amour… c’est l’homme qu’en interprétante, se dévie de ce chemin.

En ces jours de la Pentecôte le besoin d’aller à l’église était là, l’église de Croix s’ouvrait finalement.

Une ouverture qui s’est faite un jour de fête chrétienne qui célèbre l’effusion du Saint Esprit, le cinquantième jour à partir de Pâques… presque autant de jours que ceux que nous avons dû passer en confinement… une coïncidence symbolique!

L’Église considère la Pentecôte comme le point de départ de sa mission publique dans le monde. Selon elle, c’est la réalisation de la promesse du Christ aux Apôtres au moment de son Ascension, dix jours plus tôt. C’est le moment où les Apôtres vont eux-mêmes parcourir le monde, les mondes, pour diffuser l’enseignement laissé par Jésus de Nazareth: «Vous allez recevoir une force, celle du Saint Esprit qui viendra sur vous. Alors, vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre».

Eh oui, c’est là que les quatre colombes qui pendant tout l’office du samedi de Pentecôte à l’église de St Pierre de Croix, volant de l’autel pascal à l’entrée de l’église, pendant toute la cérémonie, prennent toute la signification symbolique.

Ces colombes ont probablement été libres d’occuper l’espace pendant que nous étions confinés. Elles ont profité de la liberté, la liberté des lieux, la liberté de Dieu, elles ont été les gardiennes du Temple. En volant d’un extrême à l’autre, elles ont voulu nous accueillir et nous dire de profiter de notre «nouvelle liberté» retrouvée, de notre liberté de pratiquer ou pas, de notre liberté de pensée, de notre liberté de croire ou de ne pas croire, mais enfin libres… ou presque.

Liberté individuelle qui se travaille, qui s’arrête, qui s’adapte là où celle de l’autre commence… étrange de voir autant de personnes circuler en ville sans masque, alors que d’autres en portent. En les portant, ils protègent l’autre, l’autre qui parfois ne le porte pas… La générosité n’est-ce pas de porter le maque pour protéger l’autre, protéger l’inconnu?

Cérémonie de Pentecôte désirée, mais au même temps c’était étrange de voir les mesures de sécurité, normales, prises, mais auxquelles on n’était évidemment pas habitués, mais auxquelles on doit s’y faire.

L’assistance était toute masquée, comme les prêtres d’ailleurs. Pendant la communion, les prêtes avaient des visières, il y avait pour distancer les croyants deux rangées de chaises rassemblées deux par deux, l’offrande a été matérialisée dans un panier à la sortie de l’église, le panier n’ayant pas circulé dans les rangs.

Et pourtant…

Une exposition, elle aussi, a été confinée à l’église de Croix, Saint Pierre.

Elle a été inaugurée juste avant le confinement, elle y est encore visible. Une exposition d’un prêtre bien connu dans la Communauté lusitanienne. Au moment des fêtes il préside des cérémonies en portugais. Un prêtre ancien champion sportif, un touche-à-tout.

Il y a de cela un peu plus d’un quart de siècle, il a travaillé au Brésil, dans le Brésil des pauvres. Il en a fait des photos… des photos où l’on voit la misère, mais où l’on ressent, malgré tout, une certaine joie de vivre, où l’espoir fait encore partie du quotidien.

Tout cela, Bernard Willems nous le montre avec sa très belle exposition. Un message qui nous transmet, un message que les plus pauvres nous transmettent, un message pour le présent, mais aussi et surtout pour le plus important… le demain.

À nos amis, j’ai habitude de dire que ce n’est pas parce qu’on croit, qu’on ne se pose pas de question, qu’on n’a pas de doutes. Je leur dis même qu’on se pose, probablement, encore plus de questions que ceux qui ne croient pas ou qui ne croient plus.

 

Les réflexions qui suivent sont les nôtres, elles sont personnelles, ce sont des questions qu’on se pose:

Nous sommes croyants et pourtant nous sommes aussi laïques, une valeur qu’on défend avec vigueur et force en France, c’est même l’un des principes de la République Française après «Liberté, Égalité, Fraternité».

Oui, nous sommes pour la laïcité des institutions, des administrations…

Y-a-t-il incompatibilité entre être à la fois catholique et laïque?

Les fêtes religieuses sont, d’une certaine façon, devenues profanes. Toutefois, ne doit-on pas faire savoir et expliquer pourquoi elles existent? Pourquoi commence-t-on à empêcher de monter des Crèches à Noël sous prétexte de laïcité? Doit-on arrêter de faire rêver, même les enfants?

D’accord pour ne pas promouvoir la religion, si on choisit de les éduquer, de les former dans l’école publique, mais de là à empêcher de monter des crèches…!

D’un autre côté, pourquoi se voile-t-on les yeux?

Il nous vient à la mémoire la chanson d’Annie Cordy «La bonne du curé». Pourquoi l’Église n’accepte pas de changer le statut à ces dames et de changer de statut aux prêtres mêmes? Quoi penser du fait que l’Église, devant une personne qui est mourante, affirme qu’il ne faut pas faire d’acharnement thérapeutique? N’est-ce pas une forme de laisser partir la personne?

Dans certaines conditions, alors, pourquoi ne pas aider et accompagner le départ? Dieu souhaite-t-il que l’on quitte ce monde dans des souffrances extrêmes? A-t-on besoin de passer par les souffrances extrêmes pour avoir sa place dans l’Au-delà?

Il ne faut pas, non plus, tirer un trait sur tout. L’Église évolue et continuera de le faire devant notamment le manque de vocations.

Anne Soupa, une femme de 73 ans, théologienne, vient de présenter sa candidature pour succéder à Philippe Barbarin pour diriger l’archevêché de Lyon. Sa candidature aura au moins le mérite d’essayer de faire bouger certains percepts, de poser des questions.

Aller à la messe, par endroits, ce n’est plus possible, par manque de prêtes. Ce matin nous avons eu connaissance d’un prêtre qui doit s’occuper de 58 petits lieux, villages. Dans le temps, ne pas aller à l’église le dimanche était un pêché. Par manque de prêtes, maintenant ce ne l’est plus? Ce ne l’est plus, que pour cette raison?

Une des raisons des Découvertes portugaises était de nature religieuse. Devant le manque de vocations dans nos pays européens, on voit de plus en plus des prêtres africains qui prêchent dans nos églises. Les temps changent, les appelés de Dieu aussi? Pour quelle raison?

Nous avons appris à communier en prenant l’hostie sur la langue. Si on la touchait, le sang du Christ s’épandrait. Ce n’est plus le cas et pourtant le Dieu est toujours le même…

Les messes en latin sont devenues un lointain souvenir.

Des évolutions lentes, mais des évolutions… évolutions qui s’accélèrent à l’image de ce qui vient de se passer pendant le confinement, avec des cérémonies suivies par internet, des mariages avec la présence que de 5 à 6 personnes. Le monde change, à l’Église de s’adapter, d’évoluer, de s’inventer avec l’aide de tous ceux qui en font partie.

Être croyant ce n’est pas la preuve d’avoir de bonnes mœurs, de pratiquer que le bien… Bien de non croyants, et heureusement que c’est ainsi, le pratiquent et si l’Au-delà existe, le méritent bien plus que certains croyants.

Nous venons de porter un jugement, et pourtant, est-ce à nous, l’homme, d’en porter à ce niveau?

Fêter la Pentecôte, c’est fêter l’invisible. Que l’esprit de paix, que les colombes représentent, soit sur le monde des croyants et des non croyants.

Le chemin est encore long, parfois en sent qu’il s’éloigne, quand il prend des mauvais détours, qu’on va dans le mauvais sens, qu’on dérive, à l’image des images que nous voyons des États Unis ces jours-ci à la suite de l’assassinat du citoyen américain de couleur Georges Floyd.

La faute à qui? Évidemment à nous tous, mais aussi, et parfois surtout, à cause de choix fait de mettre à la tête de pays, des personnalités qui finissent par oublier essentiel.

Nous laissons ici une réflexion qui se veut personnelle, déclenchée, inspirée, par ces belles colombes qui se sont invité aux cérémonies dans l’église Saint Pierre à Croix ce samedi d’avant Pentecôte.

 

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